Lot n° 35

ARTAUD (Antonin). [Atrée et Thyeste à Marseille]. Manuscrit autographe signé, daté 6 juillet 1934,

Estimation : 3 000 / 4 000 €
Adjudication : 4 000 €
Description
4 pages in-4, sous chemise demi-maroquin noir.
Beau texte sur un projet théâtral à Marseille.

Il s'agit d'un véritable manifeste, qui reprend et développe les idées d'Artaud sur le Théâtre de la Cruauté, préconisant une révolution dramatique. Ces préoccupations étaient alors au centre même de la vie d'Artaud, qui, en octobre 1934, publiera dans la N.R.F. sa conférence sur Le Théâtre et la Peste. Précisément, Sénèque le Tragique était, à ses yeux, un des très rares dramaturges occidentaux à s'être, dans ses pièces violentes, rapproché de son idéal théâtral. Ce texte, entièrement rédigé par Artaud, était destiné à être publié dans un journal de Marseille. Malheureusement, la représentation en question n'eut jamais lieu.

Annonce d'une tentative théâtrale d'un ordre nouveau et même tout à fait révolutionnaire : Artaud doit venir donner à Marseille son adaptation de la tragédie de Sénèque, Atrée et Thyeste, mais dans un cadre original : Pour en accuser le côté direct, immédiatement émouvant, Antonin Artaud jouera cette tragédie dans un cadre extra-théâtral, hall d'usine ou d'exposition. Ainsi le pathétique éternel du vieux drame reprendra tout son sens, son urgence, mais surtout son actualité. Son but est d'intéresser le gros de la foule à une aventure souveraine qui met en œuvre toute la gamme possible des sentiments humains et collectifs. Tous les Grands Mythes du Passé dissimulent des forces pures. Ils n'ont été inventés que pour manifester et faire durer ces forces… Il s'agit de rendre ainsi le théâtre à sa véritable destination, qui n'est pas d'être un jeu et le délassement d'une soirée éphémère… Porté par le paroxysme d'une action matérielle violente et à laquelle nulle sensibilité ne résiste, le spectateur voit s'affiner son système nerveux général, il devient plus apte à recevoir les ondes des émotions les plus rares, des idées sublimes des Grands Mythes qui par ce spectacle-là chercheront à l'atteindre par leur force physique de déflagration. Comparant un tel spectacle à certains grands opéras, il conclut en proclamant que son théâtre devra capter toute la sensibilité nerveuse disponible et dont le public ne se sert que dans les occasions extra-théâtrales, mouvements sociaux, catastrophes intimes, accidents et exaltations de toutes sortes qui font de la vie la plus gigantesque des tragédies.

Il est joint une copie du texte dactylographiée.
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