Lot n° 323
Sélection Bibliorare

LORRIS, Guillaume de, et Jean de Meung Le Rommant de la Rose [Lyon], [Guillaume Le Roy], [vers 1487]

Estimation : 120 000 / 150 000 €
Adjudication : 95 357 €
Description
TROISIÈME ÉDITION INCUNABLE DE L'UN DES PLUS GRANDS TEXTES DE LA POÉSIE ET DE LA LITTÉRATURE FRANÇAISES.

LES TROIS PREMIÈRES ÉDITIONS INCUNABLES, TOUTES ILLUSTRÉES, SONT D'UNE GRANDE RARETÉ.

EXEMPLAIRE DU MARQUIS DE CLINCHAMP, DE FÉLIX SOLAR, D'AMBROISE FIRMIN DIDOT, PUIS D'EDMÉE MAUS. CITÉ PAR BOURDILLON

Troisième édition, la première avec une page de titre.
Cette édition est illustrée, comme les deux précédentes.
In-folio (291 x 202mm). Caractères gothiques, 41 lignes à la page, sur deux colonnes. Grande initiale imprimée en noir sur la page de titre, petites initiales peintes en rouge

COLLATION : a-s8 t6 : 150 feuillets

ILLUSTRATION : 92 figures gravées sur bois dont une à mi-page (la première) et 7 répétées

ANNOTATIONS : quelques annotations et manicules manuscrites anciennes sur quelques feuillets

RELIURE SIGNÉE DE TRAUTZ-BAUZONNET. Maroquin rouge, décor doré, grand motif de rinceaux au centre des plats, encadrement de filets estampés à froid, fleurons dorés dans les angles, dos à nerfs orné, doublure de maroquin bleu orné d'une large dentelle, tranches dorées. Étui. La date "1485" est inscrite en queue du dos alors qu'il s'agit de "1487".

PROVENANCE : "Hugues de Salins, docteur médecin à Beaune" (ex-libris manuscrit du XVIIe siècle, sur la page de titre) -- marquis de Clinchamp (ex-libris ; Paris, 1860, n° 185 : "magnifique reliure de Trautz-Bauzonnet, superbe exemplaire". Sa bibliothèque fut acquise en bloc en 1860 par Félix Solar) -- Félix Solar (Paris, 1860, n° 1040 : "magnifique reliure de Trautz-Bauzonnet, superbe exemplaire") -- Ambroise Firmin Didot (ex-libris ; Paris, 1878, n° 125 : "superbe exemplaire". Acquis par Ellis, 5.500 FF)-- Thomas Brooke, à Armitage Bridge (ex-libris ; Londres, 1909) -- Edmée Maus (ex-libris) -- librairie Tulkens (note au crayon sur la garde)

Page de titre restaurée avec rajout de papier, sans atteinte au titre imprimé. Cette restauration est ancienne puisqu'elle est signalée dès le catalogue de la bibliothèque du marquis de Clinchamp (1860). Feuillets a2 et a3 légèrement plus courts

Le Roman de La Rose fut imprimé pendant soixante ans, au tournant des XVe et XVIe siècle. Bourdillon recense vingt-et-une éditions entre 1481 et 1538. Il est remarquable que le Roman de la Rose fut dès son origine illustré. Les trois premières éditions, incunables et illustrées, du Roman de la Rose, sont toutes trois très rares. Elles sont très majoritairement conservées dans les plus prestigieuses institutions publiques. Les quelques exemplaires restés en mains privées ont appartenu aux plus grandes collections. En trente ans, on ne compte que trois exemplaires proposés à la vente : un exemplaire de l'édition originale, incomplet (Albert Natural, 28 avril 1999), un exemplaire de la seconde édition (Paris, 13 mai 1987) et un exemplaire de cette édition Le Roy (Otto Schäfer, New York, III, 1er novembre 1995, n° 147). Le difficile classement de ces trois éditions réside dans l'absence de nom d'imprimeur et de date d'impression sur la page de titre ou au colophon. Cet exemplaire-ci de l'édition, dite "édition Le Roy" ("C", selon Bourdillon, et G-368 selon Guy Bechtel), fut longtemps considéré comme étant la première :

"This famous edition has been frequently taken for the first edition of the Roman de la Rose. It is the one mentioned first by Brunet... This is the first edition with a title-page".

Le Roman de la Rose fut imprimé pour la première fois à Genève vers 1481, par Jean Croquet. On en connait seulement une douzaine d'exemplaires dans les institutions publiques et un ou deux en mains privées. L'un de ces exemplaires figurait dans cette même vente d'Ambroise Firmin Didot (1878) qui proposait donc deux exemplaires incunables du Roman de la Rose. On remarque que l'exemplaire de l'édition originale (exemplaire La Vallière, sous le numéro 126) était proposé un numéro après le nôtre, l'ordre des éditions étant alors mal connu.

La deuxième édition du Roman de la Rose (Lyon, Jean Syber, vers 1485) est connue à seulement six ou sept exemplaires, probablement tous incomplets. Elle est quasiment identique à la troisième : même nombre de lignes sur deux colonnes et mêmes illustrations.

La troisième édition, dite "édition Le Roy", est connue, d'après ISTC à moins de vingt exemplaires, très majoritairement conservés dans des institutions publiques : à la Bibliothèque nationale de France (deux exemplaires dont celui de l'ancienne collection James de Rothschild), au Musée Condé, à la bibliothèque municipale de Lyon (incomplet), à la bibliothèque des Beaux-Arts de Paris (incomplet), à la bibliothèque municipale d'Angoulême, à la British Library, à la National Library of Wales Aberystwyth, à la Bodmer, à Liège (très incomplet), à Turin (incomplet), à la Bodleian, à la Pierpont Morgan, et à la Library of Congress. En mains privées, on recense : l'exemplaire Otto Schäfer, également relié par Trautz-Bauzonnet ainsi que les exemplaires cités par Bechtel : l'exemplaire de Jean-Paul Barbier, en reliure de Semet et Plumelle (11 mars 1974, n° 40), et un autre proposé à la vente, à Paris, le 28 mars 1977. Enfin, Bourdillon cite son propre exemplaire (exemplaire Buddington), et celui-ci, l'exemplaire Didot, dont il affirme qu'il est l'un des plus chers qui se soit vendu à l'époque :

"Though somewhat less rare than either of the two preceding editions, the Le Roy Folio has been probably the most eagerly sought after of all the early-printed editions, and high prices have been paid for fine copies. Thus the copy in the Didot sale, 1878, n° 125, with title, fetches 5.500 francs". (Bourdillon, p. 39).

Les exemplaires du Roman de la Rose, en édition incunable, encore en mains privées, sont donc très rares. Ils constituent le fleuron liminaire de toute collection de livres précieux. Cet exemplaire-ci confirme cette règle. Il rejoignit successivement les bibliothèques du marquis de Clinchamp, de Félix Solar, d'Ambroise Firmin Didot, de Thomas Brooke et d'Edmée Maus. Edmée Maus ne possédait pas d'autre exemplaire en édition incunable.

Les éditions qui suivirent furent également illustrées. Après 1538, ce chef-d'œuvre du Moyen Âge cessa d'être édité pendant deux cent ans, jusqu'en 1735. Pour situer l'ancienneté de ces premières éditions incunables, on peut rappeler que le premier livre imprimé en français fut La Légende dorée, à Lyon, par Barthélémy Buyer, en 1476. Le Grand Testament de Villon, la Belle Dame sans merci et Les Faits d'Alain Chartier ont tous trois été imprimés en 1489.
RÉFÉRENCES : Incunable Short Title Catalogue : http://istc.bl.uk/search/search.html?operation=record&rsid=509814&q=2 -- BMC, VIII, 367 -- Bechtel, Catalogue des gothiques français, p. 355, G-368 -- Francis William Bourdillon, The Early Editions of The Roman de la Rose, Genève, 1974, p. 39 -- Copinger, 5157 -- Proctor, 8518 -- Brunet III, 1170, Claudin, III, 96 -- Tchemerzine, VII, 231 -- Rothschild, I (1884), 435 -- Fairfax Murray I, 323 -- Stillwell, R 300 -- Polain (B), 3398 -- Goff R-309

Feuillets a2 et a3 légèrement plus courts et provenant d'un autre exemplaire.
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