Lot n° 71

Georges BERNANOS (1888-1948). Écrivain.Manuscrit autographe signé "On demande des martyrs". [Juin 1935]. 6 pp. 1/2 in-4, avec annotations manuscrites de typographes. Manuscrit destiné à l’impression d’un article paru le 19 juin 1935 dans...

Estimation : 4 000 / 5 000 €
Adjudication : Invendu
Description
Marianne, hebdomadaire de gauche fondé par Emmanuel Berl. Bernanos, avec toute sa liberté d’esprit, refuse d’accepter le clivage simpliste entre "gauche" et "droite" et s’en prend aux journalistes ainsi qu’aux lecteurs qui ont vendu leur âme. C’est par l’intermédiaire du critique Ramon Fernandez qu’il a été invité à s’exprimer dans les colonnes de Marianne et il veut se présenter aux lecteurs de Marianne comme étant de l’espèce de "ceux qui ne marchent plus", c’est-à-dire de ceux qui refusent de jouer le jeu des citoyens stérilisés, délivrés du soin de penser par eux-mêmes.(…)
Lorsque ces pauvres types ont fini de vider les lexiques, ils en reviennent toujours à la seule distinction dont ils soient réellement capables – celle de leur main droite et de leur main gauche. Homme de gauche et homme de droite. Hé bien, je ne marche plus. (…)
Je ne marche plus pour les thèmes simplistes. Ils ne sont pas simples, ils sont bêtes. Tellement bêtes que des milliers de vies humaines sacrifiées n’ont pas réussi encore à leur donner une espèce de vérité, de dignité. Homme de gauche ou homme de droite, vous voyez ça sur une tombe, vous ? Moi pas. Et Bernanos affirme que les journaux dits "d’opinion" n’existent plus, sachant que tout y est calculé par rapport au lecteur le plus bête, et que les hommes libres se perdent dans la foule des gobeurs et des badauds. (…)
Un jour viendra où pour la presse comme pour le sport, s’effacera la distinction, devenue byzantine, de l’amateur au professionnel, où l’Etat rachètera ostensiblement la grande presse comme il rachète les banques ou les compagnies de chemin de fer. (…)
Chaque public docile viendra pieusement faire queue devant l’enseigne fraîchement repeinte par les soins de l’administration (…).
Il désespère également des "élites" qui, face aux entrepreneurs, ne peuvent rien faire qu’attendre leur dernière chance : une loi sur la presse, la déclaration de l’état de siège, la guillotine en permanence – que sais-je ? Car une élite décimée vaut toujours mieux qu’une élite enrôlée (…).
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