Lot n° 94

RECLUS (Famille). Ensemble de 16 lettres et cartes adressées, la plupart adressées à Élie Faure. 1902-1916 et s.d.

Estimation : 400 / 500
Adjudication : Invendu
Description
▬ RECLUS (Armand). Lettre autographe signée. S.l., 12 février 1912. Annonce à Élie Faure la mort de son beau-père Guignard.
Officier de marine, Armand Reclus (1843-1927) fit partie de l'équipe qui explora sur place le tracé du canal de Panama et en mena les premiers travaux. Contrairement à ses frères Élie et Onésime, sa sensibilité le rapprocha des thèses de l'Action française.

▬ RECLUS (Élie). 5 missives autographes signées, soit : 4 lettres et une carte, dont une avec apostille autographe signée de l'épouse de celui-ci, Noémie Reclus. Bruxelles, 1902-1903 et s.d.
Magnifique correspondance dans laquelle il prodigue rudement mais amicalement ses conseils à Élie Faure relativement à ses textes polémiques et à ses critiques d'art dans L'Aurore.
▬ Bruxelles, 23 septembre 1902 :
« ... Ce que je demande à l'art, c'est une émotion donnée, tout au moins une émotion possible. Qui n'arrive pas à me donner une secousse intellectuelle et morale m'est indifférent. Sans m'en préoccuper davantage, on le classe parmi les photographes de la peinture. On le regarde si l'on n'a pas mieux à faire... » Et concernant les articles d'Élie Faure sur Caran d'Ache et Jean-Louis Forain.

▬ Bruxelles, 29 novembre 1902 :
« ... Tu cognes sur le bourgeois – on sent que cela te fait plaisir – mais on ne voit pas assez le pourquoi. Fais donc parler ton adversaire. C'est plus honnête, et quand on a raison, c'est plus habile... »

▬ Bruxelles, [vers 1903], sur le désir d'Élie Faure de publier ses articles en recueil :
« ... Tu as des instincts, que tu prends pour des faits acquis, des pressentiments que tu confonds avec des doctrines. Et ces doctrines, tu songes déjà d'en être le héraut et l'apôtre ? Patience, mon jeune ami, patience ! Prends le temps de transformer tes instincts en connaissances, en science consciente d'elle-même et bien ordonnée. Tu as "le don", et je t'en félicite. Mais ce don n'est encore que promesse et possibilité ; il lui faut se développer, se préciser, s'imposer, en commençant par toi-même. Non pas qu'il y faille le verbe hautain. La grâce et l'amabilité vont plus loin... J'ai lu attentivement les articles que tu... as consacrés [à Eugène Carrière]. Autant que je les ai compris, ils s'extasiaient sur la "genèse de la forme", s'appliquaient également à la musique et même à la photographie. C'était l'amplification poétique d'un sentiment juste et profond, mais ce n'était pas encore de "la doctrine"... Qu'il ne t'arrive pas l'a mésaventure advenue à ce pauvre Francis Jammes. Il avait débuté par une demi-douzaine de sonnets qui annonçaient le vrai poète. On le lui dit abondamment, il le crut surabondamment, il éreinta sa Muse qui en est restée fourbue, et depuis il ne fait plus que des "jamessiades". Il n'avait pas un bonhomme d'oncle pour lui dire : "Sache attendre, mon garçon. Attendre pour devenir ce que tu es"... » Homme politique, écrivain et ethnologue, Élie Reclus (1827-1904) affichait un socialisme anarchisant qui lui valut d'être exilé trois fois de France, en 1851 après le coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte, en 1871 après la Commune qui l'avait fait directeur de la Bibliothèque nationale, et en 1893 après l'attentat de Vaillant. Réfugié alors en Belgique, il devint professeur de mythologie à l'Université libre de Bruxelles.

▬ Reclus (Paul). 2 lettres autographes signées. 1900 et s.d. Relatives à sa carrière médicale, et concernant la mauvaise santé de son frère Élisée Reclus. Le chirurgien Paul Reclus (1847-1914) s'employa au service des troupes de la Commune, mais ne fut pas inquiété et entra à l'Académie de médecine en 1895. Il a donné son nom à une pathologie et a prôné l'usage de la cocaïne comme anesthésiant local.

▬ Reclus (Onésime). 4 lettres autographes signées (3 à Élie Faure et une à René Fouret, un des directeurs associés des éditions Hachette). 1897-1912 et s.d. (fentes aux pliures).

▬ Paris, 16 décembre 1912 :
« As-tu lu la Revue du 15 novembre ? On y lit, page 178, signature de Frantz Jourdain, dans l'article "La Maladie du passé" : "L'Histoire de l'art", prodigieux et incomparable monument élevé par Élie Faure à la gloire de l'intelligence humaine de tous les temps et de tous les pays"... »
Célèbre géographe, Onésime Reclus (1837-1916) fut le premier à employer le terme de francophonie.

▬ Joint, une lettre autographe signée d'Élie Faure à Onésime Reclus (Paris, 6 juillet 1905) :
« Mon cher oncle, tu as peut-être su que j'étais allé recueillir le dernier souffle de ton frère Élisée. En tout cas, je tiens à venir te le dire, car j'ai été avec tante Louise, le témoin de sa mort sereine. Il m'a parlé de toi, de ton dernier livre, il s'est éteint très doucement... »

▬ Reclus (Paul). 2 lettres autographes signées. À Élie Faure. S.l.,
▬ 13 février 1904.
« Nous avons conduit notre pauvre ami [Élie Reclus] au cimetière et la cérémonie obligatoire s'est passée aussi simplement que possible. D'accord avec Élisée, j'ai lu quelques mots qui devaient expliquer aux présents pourquoi il y avait tant d'absents. Tu as toujours été à côté de moi dans la dernière cérémonie, car je te considère bien plus fils de mon père que moi-même. Parmi les inexactitudes des journaux, il y en avait une d'exacte : qu'il est mort entouré de ses deux fils [Élie Faure était présent lors de l'agonie d'Élie Reclus]... » À la veuve et aux enfants d'Élie Faure.

▬ Montpellier, 1er novembre 1937.
Condoléances pour la mort de celui-ci. Écrivain, ingénieur et pédagogue, directeur de l'Institut géographique de l'Université libre de Bruxelles, Paul reclus (1858-1941), était de convictions anarchistes, et fut notamment un théoricien de l'illégalisme.

▬ Reclus (Maurice). 2 lettres autographes signées, dont, s.l.,
▬ 1er juillet 1916 :
« Ton pauvre oncle Onésime est mort hier vendredi [Maurice était le fils d'Onésime]... Le jour de sa mort, parcourait encore les journaux, sa main cherchait les livres familiers, avant hier, il récitait des vers de Hugo et plaisantait la Faculté. Enfin, Onésime, égal à lui-même, en pleine lucidité, en pleine intelligence, en pleine jeunesse de cœur, a accompli jusqu'au bout les rites de sa belle et indépendante vie et ne s'est pas solennisé pour mourir. Je l'adorais. j'ai le cœur brisé. Il t'aimait, Jean-Louis [frère d'Élie Faure] et toi, comme ses fils... »

L'historien Maurice Reclus (1883-1972) fut par ailleurs conseiller d'État et mena une carrière de haut fonctionnaire. Joint, une lettre du ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts Léon Bérard à Maurice Reclus, lui annonçant qu'il allait proposer Élie Faure pour la Légion d'honneur (Paris, 17 août 1921).
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