Lot n° 278

PAOLI (Pasquale). Lettre signée au conventionnel Pietro-Paolo Colonna de Cesari-Rocca à Quenza. Corte, 27 juin 1793. 2 pp. 1/2 in-folio, adresse au dos, déchirure marginale restaurée due à l'ouverture sans atteinte au texte.

Estimation : 10000 / 12000
Adjudication : Invendu
Description
► Très belle lettre du Père de la patrie corse ironisant sur des décrets liberticides de la Convention et se réjouissant de l'apparition d'une flotte anglo-espagnole dans les eaux corses – il prendrait bientôt des contacts pour obtenir son intervention sur l'île. Corse des Lumières, franc-maçon, ancien chef d'État en Corse (1755-1769), Pasquale Paoli était favorable aux idées libérales à l'origine de la Révolution française mais ne se reconnaissait plus dans le tour tyrannique qu'elle avait pris.
Lors d'une consulte à Corte, en mai 1793, Paoli fut déclaré « Père de la patrie » et de dures critiques furent dirigées contre la Convention. Paoli lui-même conservait une position indépendante, refusant de collaborer avec les émigrés royalistes comme avec la Convention terroriste – mais faisait alors pour cette raison le jeu de Londres.

« ... Son venute le copie di due famosi decreti della Convenzione. Il primo, ch'è del 23 dello scorso maggio, è stato provocato da un sanguinario discorso, e mozione, e mozione del cittadino Barrère, deputato alla Convenzione. In virtù dell'articolo 4to, tutti li Corsi che sono stati dichiarati in istato di controrivoluzione dai commissari, sono condannati ad essere trasportati nelle carceri di Francia.
Questo decreto è accompagnato da una insidiosa adresse della Convenzione ai Corsi, nella quale si cerca d'insinuare ad essi di arrestarmi, et di mandarmi legato in Parigi. Nel secondo si sospende il decreto del 2 aprile finché mandono alla Convenzione il loro rapporto sulle cose di Corsica i due commissari che sono stati nominati per venire ad unirsi ai primi tre. Giudicate voi di queste belle cose. Le lettere di Livorno ci assiverano che il di 14 corrente la flotta nemica combinata era alle alture di Genova. Questa flotta inglese e spagnuola è composta di 95 vascelli di guerra. La spgnuola è di 35 e l'inglese di 60.
Questa è veramente tutta roba scelta. Ci sono 21 vascelli di linea, cioè, due di cento cannoni, tre di 98, quattordici di 74 e due di 64, quindici fregate, ed altri legni di diverse portate.
In questi due giorni passati, molti di questi vascelli sono stati in faccia a Bastia, e sono stati riconosciuti dal felucone uscito di quel porto per Inglesi e Spagnuoli. Dicesi che hanno passato la punta del capo Corso, navigando all'occidente. Forse ne vedrete anche in codesti mari. Hanno gettato lo spavento nei Presidi... »

Traduction : « ... Les copies de deux décrets fameux de la Convention sont arrivées. Le premier, qui est du 23 mai passé, a été provoqué par un discours sanguinaire, et motion, et motion, du citoyen Barère, député à la Convention.
En vertu de l'article 4, tous les Corses qui ont été déclarés en état de contrerévolution par les commissaires, sont condamnés à être déportés dans les prisons de France.
Ce décret est accompagné d'une adresse insidieuse de la Convention aux Corses, dans laquelle on cherche à leur suggérer de m'arrêter et de m'envoyer ligoté à Paris.
Dans le second, on suspend le décret du 2 avril jusqu'à ce que les deux commissaires, qui ont été nommés pour venir se joindre aux trois premiers, aient envoyé à la Convention leur rapport sur les affaires de Corse.
Jugez vous-même de ces belles choses. Les lettres de Livourne nous affirment que le 14 courant la flotte ennemie combinée était au large de Gênes.
Cette flotte anglaise et espagnole est composée de 95 vaisseaux de guerre. L'espagnole est de 35 et l'anglaise de 60. Elle est de première catégorie. Il y a 21 vaisseaux de ligne, c'est-à-dire, deux de cent canons, trois de 98, quatorze de 74 et deux de 64, quinze frégates, et d'autres navires de divers tonnages.
Ces deux derniers jours, beaucoup de ces vaisseaux ont été en face de Bastia, et ont été reconnus pour anglais et espagnols par une felouque sortie de ce port. On dit qu'ils ont passé la pointe du cap Corse, navigant à l'Ouest. Peut-être en verrez-vous aussi en ces mers.
Ils ont semé la terreur dans les présides [les grandes villes corses comme Bastia, où se trouvaient les garnisons françaises, et qui étaient majoritairement anti-paolistes]... »

► Neveu de Paoli et personnage important de l'histoire corse, Pierre-Paul Colonna de Cesari-Rocca (1748-1821), fut député aux États généraux alors qu'il servait comme Capitaine au régiment provincial corse. Il était alors favorable à la conservation de la Corse dans la République et au retour de Paoli. Général en second des Gardes nationales de Corse puis colonel dans la Gendarmerie corse et enfin général,
il dirigea une partie de la malheureuse expédition de Sardaigne en 1793, suscitée par Paoli et où Bonaparte reçut le baptême du feu.

Il fit partie de la députation ayant porté les décisions de la consulte de juin 1794 au roi d'Angleterre, et accepta un poste de conseiller d'État dans le royaume anglo-corse. Après la chute de celui-ci, il vécut plusieurs années en exil, lié aux partis contre-révolutionnaires.
Napoléon lui offrit sa grâce en 1805 en lui proposant le grade de général de ses armées, mais Colonna de Cesari-Rocca la refusa et se retira simplement dans sa famille.
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