Lot n° 144
Sélection Bibliorare

ROUSSEAU JEAN-JACQUES (1712-1778) - L.A.S., Paris 27 décembre 1755, au Comte de TRESSAN ; 2 pages in-4 (rousseurs, légères fentes sur un bord).

Estimation : 8 000 / 10 000
Adjudication : 17 550 €
Description
Signed autograph letter. Paris 27 December 1755, addressed to the Count of TRESSAN ;
2 pages in-4 (foxing, some damage to one side).

♦ Belle lettre au sujet de Palissot, dont la comédie Les Originaux, représentée à Lunéville, tournait en ridicule les Philosophes, et particulièrement Rousseau (marchant à quatre pattes et mangeant de l'herbe), et que D'Alembert et Tressan voulaient faire punir.

«Je vous honorois, Monsieur, comme nous faisons tous ; il m'est doux de joindre la reconnoissance à l'estime, et je remercierois volontiers M. PALISSOT de m'avoir procuré sans y songer des témoignages de vos bontés, qui me permettent de vous en donner de mon respect. Si cet Auteur a manqué à celui qu'il devoit et que doit toute la terre au Prince [Stanislas] qu'il vouloit amuser, qui plus que moi doit le trouver inexcusable ? Mais si tout son crime est d'avoir exposé mes ridicules, c'est le droit du Théâtre, je ne vois rien en cela de répréhensible pour l'honnête homme, et j'y vois pour l'Auteur le mérite d'avoir pu choisir un sujet très riche.

Je vous prie donc, Monsieur, de ne pas écouter là dessus le zèle que l'amitié et la générosité inspirent à M.d'ALEMBERT, et de ne point chagriner pour cette bagatelle un homme de mérite qui ne m'a fait aucune peine, et qui porteroit avec douleur la disgrace du Roy de Pologne et la vôtre. Mon coeur est ému des éloges dont vous honorez ceux de mes Concitoyens qui sont sous vos ordres.
Effectivement le Genevois est naturellement bon, il a l'ame honnête, il ne manque pas de sens, et il ne lui faut que de bons exemples pour se tourner tout à fait au bien. Permettez moi d'exhorter ces jeunes officiers à profiter du vôtre, à se rendre dignes de vos bontés, et à perfectionner sous vos yeux les qualités qu'ils vous doivent peut être, et que vous attribuez à leur éducation.

Je prendrai volontiers pour moi, quand vous viendrez à Paris, le Conseil que je leur donne ; ils étudieront l'homme de Guerre, moi le Philosophe ; nôtre étude commune sera l'homme de bien, et vous serez toujours nôtre maitre»...
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