Lot n° 122

Émile ZOLA - Lettre autographe signée adressée à sa « chère femme » en voyage à Rome. Paris, 14 novembre 1895. 3 pp. in-8.

Estimation : 1 500 - 2 000 €
Description
Seconde lettre, datée du lendemain, à sa femme en séjour en Italie alors que Zola termine l’écriture de Rome, second volume de la série des Trois villes

A propos des visites de courtoisie qu’Alexandrine doit rendre sur place :
« Je vois que tu continues bravement tes visites, avec bon accueil partout, et que tu vas en être bientôt débarrassée. Tu pourras te reposer et te promener pour toi, jouir de Rome à ton aise. Tu me dis que, malgré le plaisir que tu auras à revenir, tu trouves que les journées filent bien vite. Encore une fois, reste là-bas à ta guise, prolonge ton séjour si tu en as le désir, car je veux que tu me reviennes sans aucun regret. Ici, la maison ne souffre pas; moi, je travaille, je mène ma petite vie réglée comme une machine, content si tu es contente.
– Seulement, tu me préviendras trois jours à l’avance de ton départ, par le télégraphe, pour que je cesse à temps de t’écrire au Grand-Hôtel. Je te conseille toujours de ne pas revenir d’une traite et de t’arrêter deux jours à Zurich… »

Puis de ses enfants, qu’il accompagne au cirque : «…J’ai enfin pu mener cette après-midi les enfants au Nouveau Cirque. Ils sont plus grands, ils s’intéressent davantage au spectacle. Pourtant Jacques [Jacques Rozerot, l’un de ses deux enfants naturels qu’Alexandrine fit reconnaître en 1902, au décès de leur père] trouve encore les clowns trop vilains, et il ne veut pas les regarder. Quand ils s’allongent des gifles, cela le bouleverse. C’est décidément une petite âme très sensible et très affectueuse [Jacques Emile-Zola (1891-1963) deviendra médecin] …. Denise [Denise Emile-Zola (1889-1942) épousera le journaliste Maurice Le Blond], elle, est bien gentille ; mais c’est une tête sans cervelle. A son cours, il paraît qu’elle est extraordinaire d’inattention, regardant comment la maîtresse a le nez fait, au lieu d’écouter ce qu’elle dit. Je crois qu’on aura pas mal de peine à lui mettre quelque chose dans la cervelle. Mais ça m’est égal. Je dis comme Bruneau que ça ne fait rien, pourvu qu’elle se porte bien et qu’elle ait un peu de cœur… »

Et enfin sa collaboration avec son ami Alfred Bruneau : «…J’ai ouvert mes salons, ce soir; mais je n’ai vu que Bruneau, qui vient de partir. Il est onze heures et je suis tout heureux de me coucher de bonne heure. Nous avons causé longuement de « Messidor ». Il aura fini le troisième acte dans huit jours, et il nous le jouera chez lui, vers la Noël,.. Bruneau compte avoir fini complètement « Messidor », en février. Nous avons causé aussi du « Figaro ».…En accompagnant Bruneau, je viens de laisser Monsieur Pin se promener pendant dix minutes dans la rue. Il était fou de joie.

Maintenant, il va venir faire dodo, et il en a besoin, car il doit couver une petite indigestion, tellement il a mangé de l’oie, avec moi, sur la table… »

Le compositeur Alfred Bruneau (1857-1934), élève de Jules Massenet fut critique au Gil Blas puis au Figaro. En 1888, il fait la connaissance d’Emile Zola et entretint ensuite avec lui une profonde amitié. Zola écrira le livret de son opéra Messidor qui sera crée à l’Opéra de Paris le 19 février 1897.
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