Lot n° 667

LEFRANC, Marquis de POMPIGNAN Jean Jacques (1709 1784) magistrat à Montauban et à Toulouse, poète, adversaire des Philosophes, durement raillé par Voltaire [AF 1759, 8e f]. —

Estimation : 1 500 - 1 800 EUR
Adjudication : Invendu
Description

L.A.S. « Pompignan », Paris 27 novembre 1760 ; 4 pages in‑4.

Belle et longue lettre sur la campagne menée contre lui par VOLTAIRE, et sur sa décision de démissionner de l’Académie Française.

[Lors de son discours de réception à l’Académie Française (10 mars 1760), Lefranc de Pompignan prononça une violente diatribe contre les Philosophes qui fut d’abord relativement bien accueillie et dont il transmit le texte à Louis XV. Mais Voltaire répliqua bientôt par une brochure intitulée Les Quand, notes utiles sur un discours prononcé devant l’Académie française ; puis d’autres pamphlets et vers circulèrent qui se moquaient de la suffisance et de la vanité de Pompignan qui en appelait au Roi pour lui rendre justice (il ambitionnait la place de gouverneur des Enfants de France).

« Cette lettre digne fait montre d’une grande hauteur de ton et d’une évidente noblesse de sentiments, mais on y devine aussi une âme blessée. » (Jean M. Goulemot)]

Lefranc de Pompignan remercie son correspondant de l’intérêt qu’il prend à sa cause ; il a décidé de quitter l’Académie Française, décision qu’il explique dans un mémoire secret remis au duc de LA VAUGUYON. « J’avois pris dabord la liberté de faire demander à Monseigneur le dauphin son approbation qu’il m’a accordée quoiqu’à regret, mais avec bonté. [...] j’ai ajouté des temoignages particuliers de consideration pour le prelat respectable attaché a l’education de messeigneurs les enfans de France. J’ai été chez M. l’ancien évêque de Limoges [Coëtlosquet], et je l’ai prié de trouver bon que je n’assiste pas à l’assemblée où il doit être proposé pour remplir une des deux places vacantes »... Cette démission n’est pas une preuve de faiblesse mais « un effet de ma prudence, et d’une juste sensibilité », même s’il reconnaît que c’est un grand succès pour les ennemis de la religion...

« Je me suis vû immolé à la fureur des impies dans une multitude d’écrits distribués publiquement, et cités dans des feuilles autorisées par le magistrat. [...] On souhaitte que j’aille à l’academie françoise. Si j’eusse été le 25 du mois d’août dernier, j’aurois été temoin des insultes faites à sa majesté royale, à la religion, au bon sens dans les homages rendus avec affectation à un ecrivain qui ne cesse de blasphemer les choses les plus saintes, et qui est actuellement dans la disgrace du roi »... Il propose un remède au mal :

« on pourroit me faire ecrire par un ministre de sa majesté, ou par quelqu’autre personne en place, qu’on est faché des excès auxquels le s. de Voltaire s’est porté contre moi, qu’il meriteroit d’en être puni severement, mais qu’etant eloigné de Paris par ordre du roi, il ne sera jamais à portée de reparoitre à l’academie françoise ». Si on ne lui accorde pas cela, il se retirera pour toujours de l’Académie :

« je ne viole en cela aucun loi, je ne blesse aucun devoir. J’ai formé cette resolution dans l’interieur de ma conscience ; je l’ai portée au tribunal de Dieu, je l’execute sans humeur, mais avec la fermeté et la publicité qui conviennent à mon etat, et à l’importance de l’objet »... Il a décidé de quitter Paris et d’emporter dans sa province « le souvenir de tant d’horreurs, la douleur d’avoir été si peu protégé dans une cause aussi juste »...

L’Académie française au fil des lettres, p. 124-127.

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