Lot n° 47

Gaston CHAISSAC (1910 1964)

Estimation : 1 000 - 1 500 EUR
Adjudication : 1 300 €
Description
Ensemble de 3 L.A.S. à Raymond Cogniat, du journal Arts. 1948-1949. 7 pp. in-4 et 1 p. ½ grand in-folio (37 x 27 cm). Avec une linogravure originale.
Belle correspondance relative à son oeuvre et son art. «Ma gouache à 32 ronds du 22.11.48 me fait penser que Dubuffet m'avait parlé d'airs arabes sur une seule note. Elle a quelque chose des colliers et des chapelets. Voilà quelque temps j'en étais aux crucifixions et ma femme trouve mon décapité crucifié fort tragique. Ce qui est curieux c'est que j'ai fait ce décapité sans le vouloir. C'est deux cercles l'un dans l'autre que j'ai fait sans motif qui le rende ainsi. Et à la place de la tête il y a comme l'image d'une tête». Il pense faire une exposition dans quelques mois: «rétrospective de mes tableaux sans attaches terrestres et certains seront peut-être assez étonnés que je fais des choses comme ça depuis 1938. J'ai d'ailleurs exposé au salon des réalités nouvelles. Albert Gleizes qui connait mon existence depuis 1938 m'y avait fait inviter. Sur feuille de papier de verre je n'ai peint que mon «Croisé» ça use beaucoup les pinceaux de peindre sur des feuilles de papier de verre». Un journaliste de province l'avait alors baptisé «Le Picasso en sabots». «A mon exposition à l'arcen- ciel j'avais surtout des choses exécutées en tenant compte des conseils de Monsieur André Lhote et j'avais dû très mal comprendre ses explications. J'aime surtout les produits de l'artisanat, les oeuvres d'artistes me laissent assez indifférent même les chefs d'oeuvre». Puis il parle longuement de Maurice Charrieau, un jeune paysan.
Dans sa deuxième lettre: «Je suis content car ce que je viens de peindre tombe dans l'artisanat me semble-t-il. Il n'y a que des ronds assemblés et ça figure un personnage qui semble être en perles. Il a un peu l'expression de Bécassine mais celui qui penserait que j'ai voulu m'inspirer de cette héroïne me croirait bien plus habile que je suis ». Il se propose de lui adresser quelques dessins de ce type. Il a vu un tableau de Magnelli accompagné d'un article défavorable. «Comme vocation j'avais plutôt celle du travail que celle d'une profession particulière mais j'aurai toutefois assez été attiré par le bâtiment. Je pense aux sculptures en graisse de phoque des esquimaux et je me dis que certains paysans n'auraient pas été poursuivis pour vente de beurre au-dessus de la taxe s'ils l'avaient présenté sous la forme de statuettes pétries de leurs mains».
Dans une troisième lettre, très grande et graphique, il s'exprime de nouveau sur son art: «Vers 27 ans, je me suis mis à mettre de la couleur à mes graffitis d'adultes incultes. Ce n'était pas sans précédent une chose comme ça mais je dois être un cas à peu près unique du fait que j'ai poussé l'expérience en peignant des milliers de tableaux sans prendre aucune leçon si bien qu'on peut voir à ma production ce que ça donne en partant de graffitis d'adultes incultes et persistant. Je me considère aujourd'hui comme un semiinculte.
Libre à votre journal de prendre partit contre ma peinture [...].
Mes premiers essais de coloriage eurent lieu surtout à la maison départementale de Nanterre où j'étais alors hébergé et l'élément artistique y était représenté par un vieux qui faisait des portraits au fusain d'après des photos et aussi par un homme qui avait été en prison et qui pour 4 francs faisait à la peinture à l'eau des paysages d'après des photos d'une géographie qui ne le quittait pas [...]»
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