Lot n° 17

BAUDELAIRE Charles (1821-1867) — Portrait de Jeanne DUVAL, dessin original Mine de plomb, encre et plume, 13,5 x 8 cm, contrecollé sur papier fort.

Estimation : 30000 - 40000
Adjudication : 40 300 €
Description
♦ Précieux portrait de sa maîtresse «maudite». Un des quatre dessins que Baudelaire a laissé de Jeanne Duval, dont aucun n'est légendé du nom de celle-ci, exécutés à plusieurs moments de sa vie :
«La seule femme que j'aie aimée» (lettre à Narcisse Ancelle, 30 juin 1845).

Jeanne Duval occupe une place centrale dans la vie et l'œuvre de Baudelaire. Il la rencontre au printemps 1842, et vécut par intermittences avec elle pendant près de vingt ans une passion tempétueuse qui évolua en amour charitable quand la belle, vieillie et s'éloignant de lui, fut devenue une «épave».
Les Fleurs du mal lui consacrent plusieurs poèmes majeurs, désignés parfois comme formant le «cycle de Jeanne». Ainsi, dans Je te donne ces vers :
«[...] Être maudit à qui de l'abîme profond, Jusqu'au plus haut du ciel rien, hors moi, ne répond ; - Ô toi qui, comme une ombre à la trace éphémère, Foules d'un pied léger et d'un regard serein Les stupides mortels qui t'ont jugée amère, Statue aux yeux de jais, grand ange au front d'airain !».

La mère de Baudelaire a détruit toutes les lettres de celles-ci après la mort de son fils. Le vrai nom de cette femme de couleur reste incertain, Duval, Lemer, Lemaire ou Prosper selon les documents, de même que son origine, probablement Saint-Domingue, et son emploi - il semblerait qu'elle ait tenu des petits rôles au théâtre dans les années 1838-1839. Banville, dans Mes Souvenirs (1882), en donne une description qui en souligne la dualité baudelairienne :
«C'était une fille de couleur, d'une très haute taille, qui portait bien sa brune tête ingénue et superbe, couronnée d'une chevelure violemment crespelée, et dont la démarche de reine, pleine d'une grâce farouche, avait quelque chose à la fois de divin et de bestial...» «J'ai usé et abusé; je me suis amusé à martyriser, et j'ai été martyrisé à mon tour» (Charles Baudelaire, lettre à sa mère, 11 septembre 1856).

♦ Rarissime document.

Portrait of Jeanne DUVAL, original drawing Pencil, ink and pencil, 13,5 x 8 cm, pasted on strong paper. Precious portrait of her "cursed" mistress. One of the four drawings Baudelaire left of Jeanne Duval, none of which is captioned with her name, executed at several moments of her life: "The only woman I ever loved" (letter to Narcisse Ancelle, June 30, 1845). Jeanne Duval occupies a central place in Baudelaire's life and work. He met her in the spring of 1842, and lived intermittently with her for nearly twenty years a tempestuous passion that evolved into a charitable love when the beautiful woman, aging and moving away from him, became a "wreck". Les Fleurs du mal devote several major poems to her, sometimes referred to as the "cycle de Jeanne". Thus, in I give you these verses: "[...] Cursed be you who from the deepest abyss, To the highest heaven nothing, except me, answers; - O you who, like a shadow with an ephemeral trace, Crowds with a light foot and a serene look The stupid mortals who judged you bitter, Statue in the eyes of jet, great angel with a bronze forehead!". Baudelaire's mother destroyed all their letters after the death of her son. The real name of this woman of colour remains uncertain, Duval, Lemer, Lemaire or Prosper according to the documents, as well as her origin, probably Santo Domingo, and her employment - it would seem that she played small roles in the theatre in the years 1838-1839. Banville, in Mes Souvenirs (1882), gives a description of her that underlines her Baudelairean duality: "She was a coloured girl, very tall, who wore her beautiful, ingenuous brown head well, crowned with violently crested hair, and whose queenly gait, full of fierce grace, had something both divine and bestial...". "I used and abused; I had fun to martyr, and I was martyred in my turn" (Charles Baudelaire, letter to his mother, September 11, 1856). Extremely rare document.
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