Description
Environ 134 pages à l'encre de différents formats.
♦ Précieuse et exceptionnelle correspondance de 89 lettres inédites adressées à Blanche Balain (1914-2003).
En 1937, à Alger, Camus dirige une troupe de théâtre pour laquelle il écrit, adapte, met en scène et joue, au milieu de sa «bande» d'amis : Jeanne Marodon, Heurgon, Miquel le dessinateur, Max Beral, Jeanne Sicard et Marguerite Dobrenn, Robert Namia et beaucoup d'autres... Il est censé étudier mais le théâtre et les femmes l'occupent plus que ses études.
Lors des répétitions de l'adaptation du Prométhée de Gide, une nouvelle «actrice» lui est présenté :
Blanche Balain. Fille de bonne famille algéroise, elle est, au début, peu à l'aise dans cet environnement artistique un peu déluré et politiquement engagé. Pour son premier rôle, elle ne peut dire «chéri», sa réplique, à son partenaire. Camus, lui, est dans la force de l'âge. Meneur, écrivain, charmeur, il séduit facilement. Blanche Balain ne tarde pas à tomber sous le charme ombrageux de l'auteur. Camus, dilettante en amour, trouve un charme particulier à cette jeune femme qui écrit de délicats poèmes qu'elle soumet à son amant. S'engage alors entre les deux, une longue correspondance de 20 ans, qui commence sous les auspices d'Eros puis se mue en un échange littéraire de première importance concernant l'oeuvre de Camus;Le ton de Camus change au fil de ses lettres : professoral quand il s'agit des écrits de son amie, engagé lors qu'il s'agit de politique ou de philosophie ou parfois même enflammé lors qu'il écrit sur ses oeuvres et travaux en cours, il reste toujours très évasif quant à sa situation personnelle. Il ne lui annonce jamais son mariage en 1941 avec Francine Faure, ni même la naissance de ses enfants Catherine et Jean en 1945. Camus est toujours nostalgique de leur enfance algéroise qu'il rappelle souvent, quand le soleil et la lumière méditerranéens lui manquent alors qu'il subit les rudes hivers auvergnats au Panelier, pendant la guerre. Il se targue parfois aussi d'une modestie et d'une morale que les faits contredisent comme lorsqu'il annonce qu'il refuse l'Académie Goncourt :
«L'Acad[émie]. Goncourt ! Me connaissez-vous si mal, chère Blanche. Je n'ai que du dégoût ou de l'indifférence, au mieux (mais quelle indifférence !) pour les honneurs, les titres et les privilèges dont notre société est si prodigue. Non vraiment, j'ai d'autres solidarités. C'est pourquoi j'ai refusé» (lettre du 16 décembre 1949). Il acceptera le prix Nobel en 1957 (sans en faire mention dans aucune ses lettres). Tout au long de ses 89 lettres, Camus y exprime sa philosophie, ses pensées sur la guerre approchant, comme dans la lettre du 11 novembre 1939, sa participation à la Libération et la création de Combat, ses réflexions sur la guerre, une fois celle-ci terminée, et sa vision morale du «meurtre» (suite à un article paru dans Combat qui, visiblement, choqua sa correspondante) «[...] mon objet n'était pas de refuser le meurtre en toute occasion (je le voudrais bien, mais je ne connais pas les raisons qui légitimeraient cette proposition) mais de refuser catégoriquement toute doctrine qui, PAR AVANCE, JUSTIFIE le meurtre. La nuance est importante. Il s'agit seulement d'enlever au meurtre le caractère NORMAL qu'il a pris de nos jours et de lui rendre son visage exceptionnel. [...]». Camus fait également part à Blanche Balain de ses travaux en cours, ses publications théâtrales, romanesques. Il développe longuement ses sentiments sur l'Étranger : Lettre du 16 octobre 1942 «L'Étranger est en effet un livre concerté et volontaire qui semble manquer d'émotion. Sous cet angle ce que vous dites est juste. Mais ce livre est à double sens et Meursault que j'ai essayé de rendre naturel et vivant est pourtant un symbole en même temps». Exceptionnelle correspondance.
Correspondence of 89 signed autograph letters addressed to Blanche BALAIN From December 7, 1937 to June 27, 1959. About 134 ink pages of different formats. Precious and exceptional correspondence of 89 unpublished letters addressed to Blanche Balain (1914-2003). In 1937, in Algiers, Camus directs a theatre troupe for which he writes, adapts, directs and plays, in the middle of his "band" of friends: Jeanne Marodon, Heurgon, Miquel the draftsman, Max Beral, Jeanne Sicard and Marguerite Dobrenn, Robert Namia and many others... He is supposed to study but the theatre and women keep him more busy than his studies. During the rehearsals for the adaptation of Gide's Prometheus, a new "actress" is introduced to him: Blanche Balain. The daughter of a good Algerian family, she was, at first, uncomfortable in this somewhat unruly and politically committed artistic environment. For her first role, she could not say "chéri", her line, to her partner. Camus, for his part, is in the prime of life. A leader, writer and charmer, he seduces easily. Blanche Balain soon falls under the shady charm of the author. Camus, a dilettante in love, finds a special charm in this young woman who writes delicate poems that she submits to her lover. A long correspondence of 20 years ensues between the two, which begins under the auspices of Eros and then turns into a literary exchange of primary importance concerning Camus' work. Camus' tone changes in the course of his letters: professorial when it concerns his friend's writings, committed when it is about politics or philosophy, or sometimes even fiery when he writes about her works and works in progress, he always remains very evasive about his personal situation. He never announces his marriage to Francine Faure in 1941, or even the birth of his children Catherine and Jean in 1945. Camus is always nostalgic for their Algerian childhood, which he often recalls, when he misses the Mediterranean sun and light, while he suffers the harsh Auvergne winters at Le Panelier during the war. He also sometimes boasts of a modesty and morality that the facts contradict, as when he announces that he refuses the Académie Goncourt: "L'Acad [émie]. Goncourt! Do you know me so badly, dear Blanche. I have only disgust or indifference, at best (but what indifference!) for the honors, titles and privileges that our society is so lavish with. No really, I have other solidarities. That's why I refused" (letter of 16 December 1949). He accepted the Nobel Prize in 1957 (without mentioning it in any of his letters). Throughout his 89 letters, Camus expresses his philosophy, his thoughts on the approaching war, as in the letter of November 11, 1939, his participation in the Liberation and the creation of Combat, his thoughts on the war once it was over, and his moral vision of "murder" (following an article in Combat which obviously shocked his correspondent) "[....] my object was not to refuse murder on any occasion (I would like to, but I do not know the reasons that would legitimize this proposal) but to categorically refuse any doctrine that, IN ADVANCE, JUSTIFIES murder. The nuance is important. It is only a question of removing from murder the NORMAL character it has taken on nowadays and giving it back its exceptional face. [...]». Camus also tells Blanche Balain about his work in progress, his theatrical and novel publications. He develops at length his feelings on the Stranger: Letter of October 16, 1942 "The Stranger is indeed a concerted and voluntary book which seems to lack emotion. From this point of view, what you say is right. But this book is a two-way street and Meursault, which I have tried to make natural and alive, is nevertheless a symbol at the same time". Exceptional correspondence.