Lot n° 942

MENDÈS FRANCE Pierre (1907-1982) homme politique — L.S. «Mendès France», Paris 10 mars 1949, à Winston CHURCHILL ; 4 pages in-4 dactylographiées, à en-tête Assemblée Nationale.

Estimation : 1000 - 1200
Adjudication : Invendu
Description
Belle lettre au Premier ministre britannique, apportant quelques rectifications à ses Mémoires (livre consacré à La Chute de France) concernant les parlementaires du Massilia.

Il a lu avec émotion les extraits de ses mémoires consacrés aux événements de 1940, mais tient à compléter ses informations «en ce qui concerne les incidents qui se sont déroulés à l'occasion du déplacement d'un certain nombre de Parlementaires français, dont j'étais, à bord du Croiseur auxiliaire Le Massilia», il le doit à la mémoire «de Georges MANDEL, César CAMPINCHI, Jean ZAY et Pierre VIÉNOT qui sont morts depuis, dans des conditions tragiques»... Il verra dans Liberté, Liberté chérie (1943) les pages consacrées à l'affaire du Massilia, en précisant qu'il y a été volontairement incomplet, de crainte de représailles contre Mandel et Zay, «aux mains de l'ennemi», ou la famille de Viénot, alors en France...
Il passe ensuite en revue des éléments inexacts du récit de Churchill. Il ne croit pas que l'embarquement d'hommes politiques fût un «guet-apens prémédité» de la part de Darlan, mais un projet «destiné à placer les représentants de la Souveraineté française hors d'atteinte de l'ennemi», le gouvernement présidé par PÉTAIN ayant décidé de transférer les Pouvoirs publics en Afrique du Nord. Plus tard, l'opportunité politique de se débarrasser des adversaires gênants fut comprise par DARLAN, LAVAL, BAUDOUIN, etc.
Mendès-France rectifie aussi la chronologie en ce qui concerne les tentatives des représentants de la France et de la Grande-Bretagne de s'entendre sur la poursuite de la guerre, nommant le général Noguès, commandant en chef du théâtre des opérations en Afrique du Nord, Mandel et les chefs de la mission britannique, Alfred Duff Cooper et Lord Gort, et relevant l'erreur des parlementaires d'avoir continué à loger à bord du bateau, qui fut éloigné du quai, internant effectivement les passagers... Le retour des parlementaires en France tenait à leur désir de répondre à la campagne de presse et de dénigrement ministériel dirigée contre eux... Quelques passagers du Massilia restèrent au Maroc en raison de leurs obligations militaires, dont Zay, Viénot et Mendès-France ; ils furent arrêtés, jugés et condamnés ; Viénot et Mendès-France s'évadèrent et rallièrent l'Angleterre pour participer à la guerre, alors que Jean Zay «fut assassiné dans des conditions dramatiques encore incomplètement connues»...
Que Churchill ne considère pas cette lettre comme une critique, «mais comme l'hommage d'un français qui est heureux de pouvoir contribuer très modestement, au travail que vous publiez aujourd'hui et qui évoque tant d'heures à la fois douloureuses et glorieuses pour nos deux pays»...

Des annotations en tête de la lettre témoignent du renvoi de cette lettre aux assistants littéraires de Churchill, William Deakin et Dennis Kelly, pour la révision du 2e volume.
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