Lot n° 81

CHIRICO Giorgio de (1888 - 1978) — 12 L.A.S. «Giorgio de Chirico», Paris, New York et Rome 1934 - 1948, à Julien LEVY ; 19 pages in-4 ou in-8.

Estimation : 7000 - 8000
Adjudication : 9 100 €
Description
Belle correspondance au galeriste new-yorkais, évoquant l'hostilité réciproque entre Chirico et les Surréalistes.

En 1933, Chirico voulut organiser une exposition de ses œuvres récentes à New York et choisit la galerie de Julien Levy. Ce dernier lui reprochant de se répéter, Chirico répond (Paris 26 janvier 1934) : «Je ne réussis pas bien à comprendre ce que vous voulez dire à propos de mes tableaux quand vous parlez de répétitions, et de trop de chevaux. Ma production est très variée et en Amérique les marchands ont vendu un peu tous les genres ; j'ai fait beaucoup de tableaux de chevaux, c'est vrai, [...] mais à côté de ça, j'ai fait beaucoup d'autres sujets : gladiateurs, courses de chars, manequins, ruines et paysages dans les chambres, meubles dans les vallées, etc., etc. ; il y a peu de peintres qui ont une production aussi variée que moi»...
30 juillet 1934, il rappelle les interventions de Pierre Colle et Mme Looyd, après son exposition chez Paul Guillaume, et il presse Levy de lui donner une réponse :
«je tiens beaucoup à exposer chez vous car j'ai entendu de plusieurs personnes parler de votre galerie de la façon la plus flatteuse»...
10 novembre 1934, il tient à mettre en garde Lévy contre ses ennemis : «les plus acharnés et ceux qui emploient contre moi les moyens les plus perfides et les plus malhonnêtes, ce sont les Surréalistes. L'origine de cette hostilité vient de ce que leurs deux chefs Breton et Eluard, avaient tout de suite après la guerre réussi à ramasser pour très peu d'argent et parfois même pour rien, un certain nombre de tableaux de moi peints avant et pendant la guerre. Avec ces tableaux et, profitant du fait que moi en ce moment j'étais en Italie, ils espéraient faire un coup dans le genre Douanier Rousseau ; ils ont commencé à parler de moi dans leur revue en me décrivant comme une espèce d'halluciné qui a peint quelques toiles qu'eux seuls possèdent... etc., etc. Lorsque en 1925 je suis revenu à Paris et que j'ai recommencé à vendre aux marchands mes nouveaux tableaux, à exposer et faire parler de moi ils sont devenus furieux car ils comprenaient que j'allais leur gâter leurs affaires, ce qui d'ailleurs est arrivé. Et depuis ce moment ils ne cessent de me boïcotter, par les moyens les plus lâches et les plus malhonnêtes en dénigrant mon œuvre récente. Naturellement leur rayon d'action est très limité et ils perdent toujours du terrain car les gens commencent à en avoir assez de leurs histoires et tout le monde comprend que c'est une bande d'individus fainéants et sans talent qui cherchent d'attirer l'attention sur eux par de petits scandales, des intrigues etc.» Sachant que DALI va venir à New York pour exposer chez Levy, il demande de renvoyer sa propre exposition à l'année prochaine, sachant que «Dali et sa femme tâcheront de parler mal de moi à New York» ; et il prie Levy de ne pas leur parler de lui...
22 mai 1935, il s'inquiète du silence de Lévy : «je crains fort qu'on vous ait monté la tête contre moi. Dali et autres gens de la même espèce»...
13 juin 1935, après l'annulation de son exposition chez Julien Levy : «Je travaille maintenant d'une façon trop sérieuse et d'après ce qu'on m'a dit votre clientèle se compose surtout de snobs, d'esthètes et d'autres gens pareils, c'est-à-dire de personnes qui ne comprennent rien à la peinture»... Les deux hommes se réconcilieront par la suite. En 1936, Chirico expose chez Lévy, et séjourne à Long Island ; il demande à Levy de faire renou­veler son permis de séjour, ayant vendu pour environ 3000 dollars, et s'inquiète de la vente à Hollywood ; il aimerait refaire chez lui une exposition de «gouaches importantes et bien présentées». Il écrit une préface pour l'exposition Usellini...
Paris 7 février 1939. Liste détaillée avec prix de gouaches et peintures envoyées à Lévy.
En octobre 1946, il s'inquiète de la vente de ses oeuvres, les invendus devant être remis à Alexandre Jolas ;
en décembre 1948, il donne les instructions pour leur renvoi en Italie.

— On joint :
un manuscrit autographe signé, Léonor Fini, préface pour l'exposition de Léonor FINI en 1936 chez Julien Levy (1 p. ¼ in-4 au crayon, froissée, petite déchirure). «Léonor, avec le chant qui éloigne le jour et le sommeil, Léonor avec le chant ou même le luth et l'arquebuse, ou même la sébille et le carquois se fondent en un torrent infini de pleurs»...
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