Lot n° 139

GAUGUIN Paul (1848 - 1903) — SUITE DE DESSINS originaux avec légendes autographes, Çuite d'Istoyres illustré par Gauguin et de Laval et Mr Jacques et Jourdan, [Pont-Aven ou Le Pouldu, vers 1889 - 1890] ; 21 feuillets de textes et dessins...

Estimation : 30000 - 40000
Adjudication : 54 600 €
Description
originaux au crayon : 20 ff in-8 dont 12 au format 21 x 13 cm sur papier ordinaire quadrillé, 8 au format 21,9 x 17,2 cm sur papier ordinaire satiné ligné, et 1 double feuillet in-4 replié de 30,5 x 23,5 cm.
Les 20 feuillets in-8 comportent une page de titre et 36 pages avec dessins et légendes ; le double feuillet in-4 comporte 8 dessins répartis en deux par page (quelques fentes très bien restaurées et feuillets doublés d'un très fin papier Japon).

Autrefois montés sur onglets dans un album, et depuis détachés. album in-8 (24,4 x 18,4 cm) joint : sur le dessin d'une demi-reliure à coins, plats en médium peints au peigne, bleu roi pour le dos, vert et rouge pour les coins, rouge de mars à l'emplacement habituel du papier ; cousu sur deux lanières de veau tête de nègre, pièces de lanières triangulaires en ébène bouchardé et repoli, barrettes d'ébène dans les angles des plats : dos en veau tête de nègre gaufré “petits carrés” ; gardes bicolores en veau peintes à l'identique des plats, en rouge et vert ; étui (Jean de Gonet, 2003).

♦ Extraordinaire album de dessins légendés, véritables bandes dessinées réalisées par Paul Gauguin pour le jeune Jacques Bousquet au Pouldu. Sur la page de titre, figurent également les noms de deux des peintres pionniers de l'École de Pont-Aven, grands amis de Gauguin, Charles LAVAL (1861 - 1894) et Émile JOURDAN (1860 - 1931). Toutefois, mis à part les quelques dessins de l'enfant (la Tour Eiffel, une dame, etc., sur les versos), les dessins des histoires de cet album sont de la main de Gauguin. avec deux autoportraits ou des portraits-charges. La plupart des pages sont séparées en deux ou trois cases pour les différents épisodes des histoires.
À la fin une grande feuille pliée présente des dessins satiriques ainsi que des esquisses pour des tableaux.
* Page de titre.
* Caricature de Charles LAVAL coiffé d'un béret et penché en avant, légendée «pleine lune» ; du cou pend une sorte de palette ou de masque grotesque.
* «Histoire dramatique d'un jeune gabier de mizaine et sa mort tragique dans l'île de Matapa» : en médaillon, tête de profil du «Marin» ; deux épisodes superposés : «Départ de l'Artémise», et «La tempête». Au verso, deux autres épisodes : «Marin naufragé dans l'île de Matapa» ; «entrevue avec le Krokrodille».
* Suite de l'histoire, en deux épisodes : «il fuit» ; «entrevue avec le Boâ» [le marin grimpe à un cocotier, au pied duquel le guettent deux crocodiles, alors qu'un boa descend du haut de l'arbre]. Au verso, trois épisodes : «Les sauvages crèvent l'oeil du Boâ» ; «Marin en profite pour descendre car les caïmans ont fui» ; «il s'engraisse».
* Fin de l'histoire, en deux épisodes : «On le rôtit» [les cannibales le font rôtir à la broche] ; «Fuite inattendue et Le Châtiment. Faim» [sic, les sauvages sont dévorés par le boa et le crocodile]. Au verso, dessin d'une tour de château crénelée surmontée d'un drapeau tricolore, et de deux cadres, l'un vide et l'autre avec un chien légendé «Toutou».
* Cinq caricatures d'un gros homme à la tête ronde et moustachu, dont deux où il est coiffé d'un béret, et une en pied en uniforme de gendarme. Au verso, deux autres caricatures du même, assis de dos face à un gros crapaud, et allongé.
* Histoire de Trésor des fèves, en six épisodes. Au recto : départ de Trésor des fèves, quittant la maison devant laquelle se tiennent ses parents ; il approche d'une forêt, avec deux oiseaux perchés sur une branche, l'un disant : «donne tes fèves» ; «il demande son chemin à la chèvre». Au verso (les première et dernière légendes d'une autre main) : «il rencontre un loup dévorant» ; «Fleur des pois - Trésor des fèves» ; «Fleur des pois lui donne une calèche pour le ramener chez lui» (la calèche est traînée par un cochon).
* Autre histoire de naufrage. Au recto, deux épisodes : «Le vent s'élève puis la Tempête - un homme se noie» ; «On accourt [Bretonnes sur le rivage] - il est roulé par la vague». Au verso, trois épisodes : le marin ramant dans une barque sur la mer ; il est sur le rivage, un lion s'approche derrière lui ; il tire au fusil sur un boa, «ceci est de la fumée».
* Suite de l'histoire. Au recto, trois épisodes : il tire sur un éléphant ; il regarde son tableau de chasse (lion, serpent, éléphant) ; il se retrouve face à un ours. Au verso, deux épisodes : il jette une boule que l'ours avale ; l'ours explose sous le regard réjoui du chasseur.
* «Histoire très vrê», en deux registres : une souris sur un pont marqué «cailloux» sous lequel coule une rivière où nagent deux canards, une maison et des arbres dans le fond ; perspective de rue avec un petit garçon se cachant derrière un mur.
* Trois registres : «Histoire de la cigogne ou le voleur et le gardien» (une cigogne suit une poule et ses poussins) ; « Histoire de Jacquette » avec « Jacquette » en costume breton et un homme sur un chemin ; un
personnage barbu monte la garde près d’un rouleau agricole. Suite au verso, sur deux registres : un homme essaie de prendre le rouleau, guetté par une tête de femme dans une lucarne ; il est écrasé par le rouleau, et
Jacquette vient déplacer le rouleau (deux dessins) ; tête d’enfant de profil.
* Suite du précédent, en quatre dessins : Jacquette près du rouleau ; elle est embrassée par un homme ; le personnage aplati ; deux silhouettes près d’une sorte de tour métallique. Au verso, « les malheurs du petit corbô à Jaque », en six dessins : le corbeau perché sur une branche sous laquelle s’avance Jacques, le corbeau volant puis perché sur le bord d’un verre, le corbeau pendu, Jacques pleurant.
* Frise de 3 « cochons tristes » et 2 « cochons contents » ; bras articulés, trois personnages ou pantins aux membres articulés, caricature d’une grosse tête ; autoportrait de Gauguin, de profil.
* Histoire d’Ali-Baba. Sous la caricature du gros homme, et une tête de profil (Charles Filiger ?), à côté d’une lampe allumée, dessins du « chef des 40 voleurs », de l’« âne d’Ali Baba » et la « fam d’Ali Baba » [sic].
* Suite de l’histoire. En haut de la page, un homme barbu coiffé d’un grand chapeau interpelle une servante d’auberge : « Louisse ! mon raspâil » ; en dessous, « belle soeur d’Ali Baba », avec Ali Baba sous les traits de Gauguin. Au verso, trois épisodes : « Grotte des 40 voleurs », « départ des 40 voleurs », et tête d’Ali-Baba-Gauguin avec bulle à son oreille : « Sézame ouvre-toi » ; « Âne d’Ali Baba chargé d’or » ; « Ali Baba et sa femme mesurant l’or ».
* Fin de l’histoire. Trois épisodes : « maison d’Ali Baba » ; « Le chef des Brigands demande l’hospitalité à Ali Baba », et « Les 40 voleurs dans leur jarre » ; « bonne d’Ali Baba venant exterminer les voleurs ». Au verso, deux épisodes : « extermination des voleurs » ; « Mort du chef des 40 voleurs » poignardé, suivi du mot « Faim » [sic].
* Suite de l’histoire de la cigogne. 4 cases : la cigogne tenant dans son bec une corde à laquelle pend un renard ; un chien en arrêt devant une charogne ; un pauvre nu accroupi sous des flocons de « neige » voit arriver un cavalier « baron nuque inzen » (?) ; un chien près d’une église, avec un cavalier dans le fond du paysage.
* La grande feuille pliée donne sur deux côtés ce qui semble être la fin de l’histoire de la cigogne. En haut, une chèvre et six chevreaux devant la porte du 2 « rue Chaptal », la chèvre disant dans une bulle : « Je vous prie de ne pas déranger quoique ce soit »… ; en dessous, devant la même porte du 2 « Rue Chaptal », un renard surveille une bande de petits oiseaux ; en dessous, le renard face à un paysan et trois sacs de « farine » ; tout en bas, une hyène tirant la langue face à un lapin tenant une paire de grands ciseaux. Sur l’autre page, le lapin s’éloigne, ciseaux sous la patte, abandonnant la charogne au-dessus de laquelle planent des oiseaux ; en dessous, le lapin victorieux près du puits où on jette le renard ; suit le mot « Fin ». En dessous, petit dessin d’un bateau ; et esquisse pour le tableau Pauvre pêcheur.
À l’intérieur de la feuille pliée, quatre études ou esquisses de tableaux : Bretonne de dos dans un paysage (et études de coiffes) ; paysage de rochers (trace d’un bas de visage) ; paysans criblant du blé ; paysage avec
maison sur laquelle Gauguin a noté des couleurs : « rouge » (toit), « blanc »
(mur), « vert », « terre violette ».

— On joint
- une L.A.S. de Paul GAUGUIN à Mme Bousquet, la mère du jeune garçon pour qui les dessins ont été réalisés ; 2 pages in-8.
« Chère Madame Mr de Haan [MEYER DE HAAN] et moi nous vous remercions de votre bon souvenir et dans notre solitude du Pouldu nous sommes toujours heureux quand il nous arrive un messager de bonne
amitié. Votre chanson est arrivée à bon port et je m’amuse à la chanter. Quant à l’accompagnement de guitare il se transforme en chant de mandoline. Vous savez ou pour mieux dire vous saurez que nous habitons la grande maison de la plage et que nous mangeons à côté, ce qui nous évite d’aller par le mauvais temps prendre la petite et mauvaise nourriture de Destais. Il est doux d’être à l’abri avec les orages que nous essuyons depuis un mois, et la peinture de marine va son train comme vous le pensez. […] Avec de bons baisers pour le jeune Jacques »…

— PROVENANCE
Ancienne collection Julien Bogousslavsky (son ex-libris ; Bibliothèque d’un amateur européen, Christie’s Paris, 23 mai 2006, n° 50) ; Christie’s Paris, 25 juin 2009, n° 128.
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