Lot n° 124

Alphonse de LAMARTINE (1790-1869). L.A.S. « Alph », 21 janvier 1849, à son « cher ange » [sa nièce Valentine de CESSIAT] ; 4 pages in-8 (petite tache d’encre à la dernière page)._Très belle et tendre lettre à sa nièce chérie, sur...

Estimation : 500 - 700
Adjudication : 1 088 €
Description
son labeur d’écrivain.
« Je n’ai une minute ni nuit, ni jour. J’ai été malade de rhumatisme. J’ai 26 volumes en métier, la Chambre, le Conseil d’État, 100 lettres par jour, les yeux usés, la main lasse, mais le cœur pour vous plein, jeune, vieux, tendre, ardent, compatissant, aimant, voyant, regrettant, espérant, admirant, bénissant, chérissant, invoquant comme quand j’étais Raphaël et mille millions de fois plus encore. Oui, l’âme est immatérielle et infinie comme Dieu lui-même. Je le sens avec évidence quand je pense à vous. Je suis votre père et cependant aussi votre frère, votre passé et cependant aussi votre présent, votre présent et cependant aussi votre avenir. Je vous vois naître, grandir, embellir, fleurir, fructifier, et cependant je vous vois aussi après moi vivre, charmer, aimer, vous souvenir, vieillir et venir me rejoindre dans le séjour de l’éternelle jeunesse, et cependant je suis un oncle vieillissant, se sentant vieillir, faner, affaiblir ; vous êtes des nièces incomparables en toute espèce de satisfaction physique et morale, cœurs et âmes de prédilection pour la nature et je vous aime comme si je vous avais créées ». Il évoque l’immense succès de Raphaël et des Confidences… « On s’écrie partout universellement que jamais la langue n’a tant brûlé, que c’est écrit avec un charbon sur la peau du cœur. […] Ce n’est à mes yeux qu’un pâle souvenir éteint. Mais je l’ai dit dans la préface : ce qu’il y a de plus divin dans l’âme de l’homme n’en sort jamais ; écrire, c’est profaner. Les Confidences aussi ont un succès inouï, de haut en bas, du prince au portier, curés, paysans, femmes, collégiens, on en vend quatre-vingt mille exemplaires par jour. […] Tu vas lire Graziella qui est bien grec et napolitain. […] J’en écrirai une autre bien supérieure à la fin de ma vie sensible et encore plus pure et plus diamant que Graziella ! Puis je n’écrirai plus que des cantiques pour Dieu. Mais j’y mettrai toujours les noms que j’ai le plus aimés ! […] Le prodigieux succès d’étonnement universel de tout ce que je publie en ce moment est un gage du succès de l’entreprise. Paris et la France, dans toutes les classes, excepté le juste milieu, me reviennent avec passion. Je suis suivi dans la rue comme un rayon, et non comme un homme. Je me refuse à tout, je reste dans mon isolement modeste et laborieux avec Dieu et votre pensée »…._On joint une l.a.s. de sa femme Marianne Eliza, 15 mars 1845, à la baronne de Gazan.
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