Description
Au poète symboliste belge Albert Mockel (1866-1945), auteur de Stéphane Mallarmé, un héros (1899).
Paris 9 février 1889.
En réponse à la première partie de l’article de Mockel sur Mallarmé dans la revue liégeoise Caprice Revue (n° 60, janvier 1889). [Voir n° 56]
« Mon cher Monsieur Mockel
Le mot à suivre placé au bas de votre si pénétrante étude, m’a fait attendre un peu, pour vous répondre, non, vous remercier : écrire à côté de mes travaux, j’y ai renoncé, le temps ! mais, si l’on se rencontrait une heure seulement, qu’il y aurait à causer. Vous avez mis le doigt singulièrement sur ce point que tout ou le peu que j’ai livré est chose de transition. Le reste, ce qu’il faut faire, à quoi je m’obstine, dussé-je y laisser l’âme, est à des siècles d’ici... Vous avez, dans la Wallonie, très joliment rhabillée, une fin de soleil humaine et chimérique, si neuve ». Il ajoute ses amitiés pour M. Siville (Maurice Siville, directeur de Caprice Revue).
Valvins, Fontainebleau ; 28 Septembre 1891. En réponse à l’envoi de Chantefable un peu naïve (Liège, Presses de la Wallonie, 1891).
« Je suis tardif, Mockel ; mais Chantefable un peu naïve a fréquenté ma pensée, tout ce temps ; et je voulais me définir l’œuvre, à travers mon enchantement, et cette impression qu’elle culmine dans toute la tentative contemporaine, en tant qu’une des visées atteinte. Oui, vous êtes arrivé à ce point très miraculeux (tel joli mot, dans la Note, d’“orchestre idéal” et “qu’il faut lire des yeux”, je le transpose de la page de musique à vos vers, il éclate pour moi d’évidence !) que votre texte à force de subtilité originelle et d’harmonieuse fusion se prête comme à une disparition de lui-même encore qu’on ne cesse de subir son délice ; et s’évanouit, toujours présent, en une sorte de silence qui est la vraie spiritualité. Peut-être, y a-t-il, et certainement, supériorité sur l’emploi des réels moyens, cuivre, bois, etc. puisque c’en est mentalement la raréfaction ; mais libre, native, géniale et sans grotesque préméditation. Je vous félicite absolument, mon cher ami »…
Paris 28 mars 1897. Mockel a noté en tête au crayon : « à propos de l’album que nous lui avions offert pour le fêter » [le 23 mars, les 23 « Mardistes », à l’initiative de Mockel, avaient offert à Mallarmé un album, où chacun avait écrit une contribution poétique].
« Mockel, cher
laissez très dans le coin l’épigraphe que si gracieusement vous me prenez : votre poème jaillit de lui-même, avec quelle pureté magnifique et retombant et s’élançant encore suivant une seule ligne spirituelle, intacte après plusieurs lectures. Je suis heureux de le posséder, là, selon votre écriture ou plus proche de votre regard qui en compose le cristal, joueusement et précieusement. Alors, je vous presse donc la main, comme j’aime le faire aux rencontres ou, vous le sentez, d’une façon pensive et particulière ; affectueuse aussi, dans ce cas, surtout, que je vous sens pour une grande part et le devine, sans avoir pu le dire devant tant d’amis l’autre jour présents, Mockel, l’initiateur de la démarche inestimable d’amitié qui décida la remise du noble album aux mains de votre Stéphane Mallarmé ».
— Provenance :
Collection du Dr Benoît Dujardin (achetées à la librairie Ronald Davis en décembre 1956) ; publ. Stéphane Mallarmé, Lettres et autographes présentés par B. Dujardin. Préface par Henri Mondor (Empreintes, n° 10-11 ; Bruxelles, L’Écran du monde, 1952, p. 106-107).
— Correspondance (Austin), t. III, p. 287 ; t. IV, p. 310 ; t. IX, p. 112. – Correspondance (Marchal), nos 1063, 1592 et 2899.