Lot n° 205

ROUSSEAU JEAN-JACQUES (1712-1778). MANUSCRIT autographe, avec notes autographes de Mme DUPIN, Etat de l’Eglise… ; 26 pages in-4 sur 14 feuillets in-4 numérotés 1-12 (avec un f. 3 ½, et une p. 6 ½).

Estimation : 4 000 - 5 000 €
Adjudication : 11 700 €
Description
♦ Important manuscrit sur la situation des femmes et le pouvoir des Papes dans l’Église, du IVe au XVIe siècle.

Ces notes se rattachent à l’ouvrage sur les femmes que Rousseau entreprit dès 1746 et jusqu’en 1751 pour sa protectrice Madame Louise DUPIN de Chenonceaux (1706-1799), et qui ne vit jamais le jour.

Elles suivent l’ordre chronologique, ponctué par des rubriques marginales : « Etat de l’Eglise avant Clovis », puis « 6e siècle »… jusqu’au « 16e siècle ». Le manuscrit est soigneusement écrit sur la moitié droite de la page, avec des additions dans la marge de gauche, dont deux de la main de Mme Dupin. Les informations concernant les femmes diminuent après les premiers siècles.

« Etat de l’Eglise avant Clovis. Avant l’êtablissement du Christian[ism]e dans les Gaules il y avoit des femmes druides. Mela parle de certaines Prétresses d’une Divinité ; qui êtoient au nombre de neuf et gardoient une virginité perpetuelle. On leur attribuoit pl[usieu]rs qualités surnaturelles. Quoique la prédication fut particulièrement reservée aux Evesques, il est arrivé quelques fois que des Laiques et des femmes même ont annoncé la foy aux infidelles. St Augustin fut le pr prestre auquel les Evêques accordèrent l’honneur de prêcher devant eux. Le mariage passoit pour impur et presque pour un combinage quand il n’êtoit pas beni durant la célébration des Sts Mystères. Les Diaconnesses jouissoient des immunités du clergé, et avoient diverses fonctions. On les choisissoit parmi les Vierges, les veuves professes ou les femmes des Evesques. Furent supprimées par le pr Concile d’Orange en 441 »…

Suivent alors des notes concernant le mariage et l’élection des évêques, des évêques assassins, des décisions de divers conciles : prise de voile, communion des femmes, maintien du mariage des hommes mariés entrés dans les ordres, immunité des papes, etc., siècle après siècle depuis le 6e siècle.

Au VIIIe siècle existaient « des Réligieuses qui chantoient à la messe, entonnoyent des alleluya, récitoient des leçons. Des Abbesses qui donnoient la benediction aux hommes avec le signe de la croix et voiloient des filles avec l’autorité sacerdotale »… Mme Dupin ajoute : « Sur la fin du 8e siecle les papes netoient pas encore souverains de Rome puis que leurs etats leur ont eté donnés par Pepin pr roy de la 2 race ».

Au IXe siècle, le concile de Vernon défendit aux religieuses de se couper les cheveux et de porter l’habit d’homme. « On peut juger du pouvoir des conciles de ce siècle-là par ces deux traits. Dans celui d’Attigny 870, Carloman fils de Charles le Chauve fut condanné à la prison pour crime de rebellion et dans celui de Mantaille, la Bourgogne cis-jurane fut erigée en Royaume et Boson fut élu Roy. Les Conciles déposoient et élisoient les Roi s très fréquemment »…

Au Xe siècle, les évêques et les abbés allaient à la guerre… Au XIe siècle, « le manicheisme reprit racine en France […] apporté par une femme italienne que Mezerai ne nomme pas »…

Le XIIe siècle fut marqué par des schismes fréquents, et des hérésies, « si l’on peut appeler ainsi les plus monstrueuses opinions que l’ignorance et la barbarie puissent enfanter »…

Au XIIIe siècle : « Les Croisades qui n’avoient d’abord été pratiquées que contre les infidelles furent employées par les Papes contre leurs ennemis particuliers. […] Les 4 ordres mendians instituéz dans ce siècle pullulent extrèmement »… Rousseau insiste, au XIVe siècle, sur les revenus des Papes par le paiement des bulles et l’augmentation des bénéfices, et sur les réformes initiées par Jean Duns Scot ; et au XVe siècle, sur le Concile de Constance.

Le XVIe siècle est consacré à la Réforme. « L’établissement des nouvelles Religions et la Tyrannie des Prètres de l’inquisition remplirent toutte l’Europe de guerres civiles et de meurtres durant ce siècle. Il ne faut pas douter que les disputes que cela produisit n’ayent beaucoup contribué aux progrès des sciences. […]

Martin LUTHER Moine Augustin, après avoir longtems déclamé contre les indulgences dont le Pape avoit accordé le négoce aux Jacobins au préjudice de son ordre, leva enfin le masque l’an 1520 et se déclara entièrement contre l’Eglise Romaine.

CALVIN le suivit de près, il fit tout ce qu’il put lui et ses sectateurs pour s’unir avec Luther qui les rebutta toujours fièrement les traittant d’hérétiques. […] Ces deux réformateurs s’accordoient à nier la supérorité du Pape, à ne vouloir d’autre règle de leur foy que la Ste Ecriture, à en rejetter pl[usieu]rs livres comme apocrifes, à retrancher plrs de nos sacremens, à nier le Purgatoire, le culte des Saints &c. Mais ils différoient en ce que Luther reconnoissoit la présence réelle, cependant avec certaines modifications, et Calvin la rejettoit tout à fait », etc.
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