Lot n° 65

Liszt (Franz). Lettre autographe signée [à josephautran].Avignon, 6 mai 1845. 4 pp. in-8, plis renforcés à la bande adhésive. imPortante lettre relative à son ProJet d'oratorio sur l'enfer de dante. « Ces points veulent dire une foule de...

Estimation : 3.000 / 4.000
Adjudication : 4 000 €
Description
remerciements indicibles, qu'une poignée de main traduirait mieux que je ne saurais le faire à distance. Déjà l'année dernière je vous étais tout acquis ; mais aujourd'hui il me semble qu'il se mêle encore quelque chose de plus sérieux et de plus tendre dans l'amitié que je vous garderai toujours. Mais pour suivre le nouveau précepte de Mr le marquis de Forbin-Janson qui veut qu'on garde de justes termes en toutes choses, passons (non pas outre...) mais au fait, et ce fait nous conDuit Droit en enfer .je viens De reLire Le Dante, et je suis entièrement De votre avis quant au récit imPersonnel. mais en revanche je crois qu'iL fauDra faire parLer personneLLement (en ch&ur et aussi en soLos pLus brefs) au moins pLusieurs catégories De Damnés ."Nous sommes les flots et les ondes" etc. [citation du premier poème du recueil d'Autran Les Poèmes de la mer] "Nous sommes les hérésiarques" - etc. et même, pour varier, peut-être serait-iL bon que Dans un cercLe ou 2 Les esPrits invisiBles chargés De tourmenter ces pauvres âmes se chargent eux -mêmes D'expLiquer au pubLic Les crimes Des réprouvés; quelque pont-neuf littéraire et musical dans ce genre : "Malheur à vous, qui passiez vos nuits dans les festins et les orgies (suit l'indication du supplice comme contraste) ; malédiction sur vous" ; etc. etc. etc. pantoufle [expression servant à mettre un terme à une énumération]. vous souvient-iL De La fin Du premier acte De lucrèce Borgia [de victor hugo] : « Je suis Maffei Orsini dont vous avez assassiné... (je ne sais plus quel parent et à quel degré)... Je suis un tel, puis un tel". cette situation a fourni L'étoffe D'un exceLLent finaL à DoniZetti [qui a adapté à la scène le drame de Hugo], et dans notre reuvre cette forme sera toute naturelle et plus saisissante qu'aucune autre. Relisez donc la fin du premier acte de Lucrèce Borgia et si vous le trouvez bon servez-vous en. iL y aura matière à un ch&ur très piquant Des Prodigues et Des avares attachés ensembLe et se choquant les uns contre les autres et se maudissant mutuellement... presqu'à tous les cercles, le cadre me parait excellent - à vous à le remplir. Bien entendu qu'il faut garder et faire chanter les vers suprêmes : "Per me si va nella città dolente Per me si va nell'eterno dolore... Lasciate ogni speranza", etc. [citation du chant III de « L'enfer »] et puis ceux-ci encore : "... Nessun maggior dolor Che ricordarsi del tempo felice Nella miseria..." [citation du chant V de « L'enfer »] [Ces deux citations seraient les seules à figurer dans sa Faust-Symphonie.] en généraL ne craigneZ pas non pLus De Dessiner épiquement Les principaLes figures ; ne recuLeZ même pas Devant homère etaLexanDre au besoin... je tâcherai bien De Les barbouiLLer De couLeurs Du mieux que je pourrai. Pardonnez-moi, cher ami, de vous parler ainsi à tort et à travers d'une reuvre aussi sérieuse. iL y a un proverbe français, je crois, qui Dit "bête comme un musicien". je me consoLerai parfaitement D'une bêtise à La conDition D'être un véritabLe musicien, et De vous faire un beL enfer... »
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