Lot n° 131
Sélection Bibliorare

COLETTE — La Retraite sentimentale. Paris, Mercure de France, 1907. In-8, maroquin rouge janséniste, doublure de maroquin mauve bordée de maroquin cerise et encadrée de deux filets dorés, gardes de maroquin mauve, double gardes, tête dorée sur témoins, étui bordé (G. Bontaz). Édition originale.

Estimation : 8000 - 10000 €
Adjudication : Invendu
Description

Édition originale.

Un des 29 exemplaires sur Hollande, après 5 Japon.
Double envoi autographe signé de Colette à Willy, à l’encre noire et à l’encre violette sur le premier feuillet blanc : À mon cher Willy, sa fidèle amie Colette Willy et sa fille qui l’aime de tout son cœur. Fille ( ?).

Très précieux exemplaire du dernier volume de la série des Claudine dédicacé à Willy.

Colette avait épousé Henry Gauthiers-Villars, dit Willy, en 1893. Il la poussa à écrire la série des Claudine : Claudine à l’école, Claudine à Paris, Claudine en ménage et Claudine s’en va. Tous ses romans, qui connurent un immense succès parurent sous le seul nom de Willy. Colette divorça d’avec son Pygmalion cavalier en 1906 et publia en 1907 le premier roman signé de son seul nom, La Retraite sentimentale. Celui-ci, plus grave et plus profond que les précédents, est le dernier qui mette Claudine en scène. Il marque la transition entre la première période de Colette et son œuvre future.

La rupture entre Colette et son mari n’alla pas sans heurts et fit couler beaucoup d’encre dans les gazettes parisiennes. Colette garda toujours à son égard des sentiments ambivalents, partagée entre la tendresse et le ressentiment. C’est pourquoi il est particulièrement beau de voir cette première œuvre de la romancière émancipée dédicacée à son ancien mentor abusif.
Cet envoi absolument remarquable a été écrit en deux temps, et peut-être à deux époques différentes. Le premier envoi a certainement été écrit au moment de la parution de l’ouvrage. Il témoigne, après la séparation, de la permanence mais aussi de l’évolution des sentiments. L’amour s’est mué en amitié. La signature, Colette Willy, insiste sur l’indéfectibilité du lien qui les unit. Le ton de cette dédicace est tout de même un peu neutre, et c’est sans doute pourquoi Colette a ajouté la deuxième partie de l’envoi, soit qu’elle se soit aussitôt ravisée, soit, et cela est plus vraisemblable compte tenu de la différence de l’encre, de l’écriture et des sentiments manifestés, qu’elle ait rédigé ces lignes bien plus tard, au cours d’une visite rendue à Willy. L’amour, s’était changé en amitié ; voici qu’il laisse la place à un sentiment filial. Willy, de quatorze ans plus âgé que Colette apparaît désormais à ses yeux comme une figure paternelle.
Ce double envoi laisse donc deviner l’évolution de la relation tumultueuse et complexe qui unit Colette à Willy.

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