Lot n° 166

KISLING Moise (1891 - 1953) — L.A.S. «Kiki», Sanary-sur-Mer (Var) — 9.II.1948, à Ruth THOMAS à New York ; 5 pages in-4, enveloppe.

Estimation : 1000 - 1500
Adjudication : Invendu
Description
Très belle et longue lettre.

À Pâques il rentrera à Paris dans son nouvel atelier au 6, rue du Val-de- Grâce ; pour vivre à la campagne il faudrait beaucoup d'argent et «une certaine atmosphère dans la maison», et le contexte avec sa femme est difficile, «malgré que la pauvre fait tout pour m'être agréable».

Il s'installe donc à Paris et ira de temps en temps à «la Baie» à Sanary «pour gouter le beau soleil du midi. Quant à la liste noir que j'ai commençai à Hollywood elle n'existe plus parce que le monde n'existe plus pour moi. L'humanité est décidément trop bête, toutes les leçons qu'elle a reçu ne lui sert à rien et ce n'est donc pas la peine de faire attention si tu donne la main à un nazi ou antinazi parce que 5 minutes après le nazi peut devenir antinazi et vice versa. Et puis la ligue de lâches et malhonettes est trop forte la seule arme contre eux est de se créer un petit monde à soit une sorte de coquille rentrer là-dedans et faire ton travail. Heureusement que je suis peintre et ça me permet quand je suis devant mon chevalet de tout oublier et être heureux ou malheureux selon la réussite de mon tableau»... Il répondrait à toutes ses questions si elle en avait fait autant, lui disant tout des points de vue matériel, physique, moral, mental «et évidement sexuel. Quand je saurais tout ça je t'écrirai beaucoup de choses sur moi. Tu m'aimes encore ? Vraiment je vois que tu es folle ! (Chose que je soutenai toujour). Comment peut-on aimer un homme come moi ! Enfin si ça te fait plaisir je n'y peux rien ! Mais crois-moi ma chère Ruth que je n'ai pas peur et je ne courre aucun danger !! - Seulement je ne voudrais pas et si j'ai agi quelques fois assez brutalement avec toi c'est uniquement pour que (étant folle comme je te connais) tu ne souffre pas. Je crois que c'était dur pendant un certain temps mais j'ai réussi quand même»... Il demande si elle songe à venir en Europe et à Paris, qui ne change pas, à la différence d'amis, comme leur Eva qui vit avec une journaliste et tâche de chanter : «on a une impression en l'entendant que c'est du lointain passé»... Ruth est gentille de vouloir lui envoyer un cadeau d'anniversaire : le meilleur serait du lait condensé sucré, «nour­riture indispensable pour mes histoires d'estomac»... Il espère qu'elle répondra à toutes ses questions. «Si par hasard tu as une bonne photo de toi tu me feras plaisir de me l'envoyer. J'ai sur mes murs les photos de mes amis et ça me fait plaisir de les regarder de temps en temps dans ma solitude complète»...
Partager