Lot n° 31

CÉLINE (Louis-Ferdinand) — Lettre autographe signée « LFCéline » à Charles Deshayes.

Estimation : 800 - 1000 €
Adjudication : 1 000 €
Description
« Le vendredi » [Copenhague, 14 mai 1948, d'après le cachet postal]. 2 pp. in-folio sur papier mince, enveloppe conservée.
« ... Vous faites des folies ! Elles sont admirables, bien sûr, ces girouettes mais trop coûteuses ! [Allusion au Dictionnaire des girouettes publié en 1948, dans lequel le journaliste Jean Zidler, connu sous ses pseudonymes de Jean mazé et Orion, désignait des vichystes ayant poursuivi tranquillement leur carrière après la guerre.] Oh vous savez Rougier est un guignol, comme les autres [le professeur de philosophie Louis Rougier, compromis dans la Collaboration, qui publia de nombreux ouvrage dont un visant à accréditer la thèse du glaive et du bouclier, Les Accords Pétain-Churchill, en 1945, ou encore Pour une politique d'amnistie, en 1947]. DANS LA VIE IL N'Y A QUE LA MALADIE, LA PRISON, LA MISERE, ET LA MORT DE SERIEUX. TOUT LE RESTE EST FARCES ET GIGOTTERIES PLUS OU MOINS OBSCENES. Pas de quoi se frapper. Tout est faux. Le tout est nom de Dieu de sortir des mauvais pas, à n'importe quel prix. Et j'y suis dans un mauvais pas ! Ah là là ! Assez con pour m'y être fourré ! TOUT CE QUI EST POLITIQUE EST PIRE QUE TOUT LE RESTE. DANTON A TOUT DIT. Et en plus en amateur idéaliste pacifiste bénévole comme moi ! C'est aller à la pêche aux requins avec une épuisette ! Bien sûr qu'on en ressort bouffé ! À la rigolade du monde entier ! C'est pas volé !... »

DESHAYES, « UN JEUNE FERVENT, QUI POSSEDE UNE EXCELLENTE PLUME PAMPHLETAIRE, UN TEMPERAMENT » (CELINE). Jeune journaliste lyonnais, fougueux admirateur de Céline, Charles Deshayes était désireux de défendre celui qu'il appelait « cher maître », voire « cher grand maître ». Étant entré en contact avec lui par l'intermédiaire de l'avocat maître Naud, il mena une campagne de presse en sa faveur, lui chercha une maison qui veuille bien l'éditer à nouveau, et surtout se lança en mars 1950 dans un projet de livre-plaidoyer intitulé L'Affaire Céline : Céline l'encouragea un temps avant de s'agacer de ses maladresses et surtout de s'inquiéter d'une publicité supplémentaire inopportune. Charles Deshayes tenta malgré tout de faire éditer l'ouvrage, en vain, et leurs rapports se refroidirent puis cessèrent complètement à partir de mars 1951. En 1956, il chercha à reprendre contact avec Céline par l'intermédiaire de la secrétaire de celui-ci, Marie Canavaggia (voir ci-dessous la pièce jointe au n° 39).

Lettres à Charles Deshayes, p. 93.
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