Lot n° 36

CÉLINE (Louis-Ferdinand) — Lettre autographe signée « LFC » à Georges Geoffroy.

Estimation : 1200 - 1500 €
Adjudication : Invendu
Description
Korsør au Danemark, 26 octobre 1949. 5 pp. 3/4 in-folio, enveloppe conservée.
« Ah cher vieux, il n'y a rien du tout d'arrêté, d'officiel, le brave Mik [Thorvald Mikkelsen, avocat danois de Céline] à chaque coup s'y laisse prendre – LA LANGUE FRANÇAISE EST SORCIERE. JULES CESAR EN L'AN 52 AVANT J.-CHRIST LE NOTAIT DEJA, parlant de nous : ""Ils promettent, ils nient"", tout est dit. Toujours absolument valable.
LA NATION FRANÇAISE EST AUSSI EPILEPTIQUE, PENDANT SES CRISES ELLE DECHIRE TOUT, ASSASSINE TOUT. Sa crise est finie ? Tu penses... hum...
MA CHETIVE PERSONNALITE BIEN SUR EST OUBLIABLE ! CETTE BLAGUE. MAIS MON ASSASSINAT PEUT FAIRE VENDRE ENCORE QUELQUES JOURNAUX. Ça suffit !
Au surplus, nous sommes toujours de désastreux idiots, quand nous voulons passer outre les traditions, or il y a une tradition bien établie, une tradition française d'acier, pour ce qui concerne les tribunaux d'exception à travers l'Histoire, et surtout les poursuites des écrivains. NE JAMAIS RENTRER EN FRANCE POUR SE FAIRE JUGER PAR UN TRIBUNAL DIT D'EXCEPTION. JAMAIS. DEPUIS VILLON (1440) TOUS LES ECRIVAINS MANDES PAR CEUX-CI ONT TOUJOURS REPONDU : MERDE ET S'EN SONT PARFAITEMENT TROUVES. Tu reviens : tu mérites d'être pendu ! comme idiot. Mille fois l'exil que d'aller faire l'andouille devant ces jurys d'assassins et de chienlits pillards roublards juanovicistes. Qu'ils me saisissent ? C'est une iniquité, une infamie de plus. C'est tout. Je ne suis coupable de rien du tout, au contraire. J'ai prévenu les Français que s'ils déclaraient la guerre, ils allaient à la catastrophe et finale en 37. En 49, les événements me prouvent que j'avais raison. Je m'en fous d'avoir raison !! mais c'est ainsi. Chirie des Français ! ce sont des ""na"" !, comme les Allemands sont des ""Ia"" ! mauvaise foi d'un peuple féminin. Avoir raison ! Qu'ils aient raison, diantre ! mais ils m'ont emmerdé suffisamment ! Des risques ? Tu parles ! Eh foutre je les ai tous pris ! Et je les ai payés ! Je n'en prends plus ! Jamais. JE RENTRERAI EN FRANCE QUAND L'ABATTOIR SERA BOUCLE. IL NE L'EST PAS, ON M'Y ESCOMPTE. CE SONT LES AUTRES, LES SPECTATEURS QUE JE VEUX VOIR S'ENTRE-EVENTRER, LES VOYEURS. Pas toujours les mêmes dans la lice ! Ça vient, petit pote, ça vient ! Patience comme tu sais ! C'est le moment. Patience, OU je suis – caractère. Que les tanks passent à mes chacals sur leurs ventres. Patience ! Patience !... »

Sur Georges Geoffroy, voir ci-dessus le n° 28.
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