Lot n° 1372
Sélection Bibliorare

GENET, Jean. Le Spectre du coeur [Pompes funèbres]. [1944-1945]. Dactylogramme corrigé en partie …

Estimation : 60 000 - 80 000 EUR
Adjudication : 114 400 €
Description
GENET, Jean. Le Spectre du coeur [Pompes funèbres]. [1944-1945].
Dactylogramme corrigé en partie autographe monté sur onglets dans un volume in-folio : toile écrue moderne, étui.
PRÉCIEUX DACTYLOGRAMME CORRIGÉ PAR JEAN GENET, AVEC 99 AJOUTS AUTOGRAPHES :
IL OFFRE UN ÉTAT PRIMITIF DU ROMAN ET SEMBLE ÊTRE “LA VERSION LA PLUS ANCIENNE DU TEXTE DISPONIBLE À CE JOUR” (EMMANUELLE LAMBERT).
L'ensemble est composé de :
- 205 pages dactylographiées à numérotation suivie de 1 à 204 (la page 46 manque, la page [49] n'est pas chiffrée, une page 79bis, les pages 94bis et ter correspondent aux pages 95 et 96, les pages 144 à 149 ont été placées après la page 171bis et renumérotées 171 ter à 8). Les corrections, à l'encre bleue ou noire, portent parfois sur un seul mot, parfois sur plusieurs lignes avec ajouts autographes. Certains feuillets ont été découpés et remontés.
- 99 ajouts autographes, numérotés ou lettrés, sur feuillets de format divers, la plupart sur papier quadrillé, dont un présente au verso des notes de travail.
On trouve en tête :
- Un dessin original de Jean Cocteau pour un projet de couverture sur une page in-4, à l'encre noire, au verso d'un feuillet à l'adresse de la Maison du Bailli, à Milly-la-Forêt [la propriété de Cocteau acquise en 1947]
- Un feuillet de titre autographe signé sur papier rose cartonné portant : Le Spectre du coeur /
Jean Genet.
Cette première version connue de Pompes funèbres offre de nombreuses et importantes différences avec le texte publié : elle provient des archives de Paul Morihien, l'éditeur de la deuxième édition du roman en 1948.
Dans une lettre adressée à Marc Barbezat, Genet évoque le roman sous son titre primitif dès novembre 1943 et rapporte le malheur qui le frappe : la destruction de son manuscrit.
Il le reprend en mars 1944, mais son travail va être bouleversé par la mort de son amant
Jean Decarnin, tué par un milicien au mois d'août suivant, pendant la libération de Paris.
Lorsque Jean Genet confie son manuscrit à Gallimard, qui en donne en 1947 une première édition clandestine sous l'adresse fictive de “à Bikini, aux dépens de quelques amateurs”, c'est sous le titre définitif de Pompes funèbres, accompagnant également les extraits publiés dans
Les Temps modernes (décembre 1945).
Un an plus tard, en 1948, Paul Morihien en donne une deuxième édition hors commerce.
Le roman paraît pour la première fois en librairie dans le tome III des OEuvres complètes de Genet aux Éditions Gallimard en 1953.
(Genet, Romans et Poèmes, Gallimard, La Pléiade, 2021, pp. 1456-1461.)
Provenant des archives de Paul Morihien, à qui Genet avait d'abord cédé les droits du roman, ce dactylogramme a pu être identifié par les éditeurs de la Pléiade comme étant la version la plus ancienne disponible à ce jour, d'après la frappe, les corrections des tapuscrits et des manuscrits postérieurs, portant pour certains d'autres titres (L'OEil de Gabès ou La Vie inférieure) et bien entendu d'après l'organisation du texte lui-même.
D'après Pierre-Marie Héron, il s'agit de la version lue par Jean Cocteau en janvier 1945.
Jean Genet avait pensé dédicacer son livre à Jean Cocteau, qui lui aurait suggéré le titre définitif, avant de se raviser afin de rendre hommage à Jean Decarnin.
(Genet et Cocteau : traces d'une amitié littéraire in Cahiers Jean Cocteau, n°1, 2002)
Le récit débute sur un premier feuillet, non paginé, titré “Le spectre du coeur”, annonçant la mort de Jean Decarnin, avec des variantes par rapport à la version définitive :
Sur les barricades du dix-neuf août mil neuf cent quarante-quatre, par la balle d'un milicien charmant, orné de sa grâce et de son âge, la mort tranquille d'un communiste de vingt ans fait honte à ma vie. V oici en bref son portrait : ses cheveux étaient blonds, et bouclés, qu'il portait très longs. Ses yeux étaient bleus ou verts mais extraordinairement limpides. [...] Je mets quelquefois les pieds sur ces ruines rouges et j'ai l'impression, tant elles sont délicates, discrètes, parfumées d'humilité, de poser ma semelle son visage. Il s 'appelait Jean Decarnin.
Le récit est ensuite divisé en chapitres, dont les titres disparaîtront dans la version définitive, et dont l'agencement variera : L'OEil de Gabès, Jean Decarnin mon tendre amant, La Soirée au cinéma, Raison des fleurs, Raisons de la France et de l'ombre, Reprenez votre rang, P aris la nuit, Paris la nuit (suite), La diane, Paris la nuit (suite), Au cri de Dieu le veut, Noir de foudre, Erik seul [en majuscules], Au large de Terre-Neuve, Vol d'abeilles, Conseil, Le cortège somnambule, Présentation de Paulo, Paulo [en majuscules], Sous la terre légère,
Encore Decarnin [nom en majuscules], Le cortège, Hitler ou moi, Le Cimetière, L'Intérieur du tombeau, Hitler seul [en majuscules], Erik seul [en majuscules], Erik et Riton [en majuscules], Nocturne [en majuscules],
Le Curé [en majuscules], La Chance chancelle, Le Festin
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