Lot n° 33

Marcel PROUST — Manuscrit autographe ; 1 page in-8 (17 x 11 cm) sur un feuillet de papier vergé.

Estimation : 4000 - 5000 €
Adjudication : 16 250 €
Description
Brouillon pour la description de l’église de Combray dans Du côté de chez Swann (Pléiade Tadié, t. I, p. 60-61), avec ratures et corrections, présentant des variantes avec le texte définitif. Les mots biffés sont mis entre crochets.
« Un édifice [dont le vaisseau, construit] occupant si l’on peut dire, dans un espace à quatre dimensions, – la quatrième étant celle du temps, – [dont le vai bâti à même] déployant à travers les siècles [et qui déployait à travers eux] son vaisseau qui, de travée en travée, de chapelle en chapelle, semblait remplir et franchir non pas quelques mètres mais une époque dont il sortait victorieux ; dérobant le rude et farouche onzième siècle dans l’épaisseur de ses murs d’où il n’apparaissait avec ses lourds cintres bouchés et aveuglés de grossiers moellons que dans la profonde entaille que creusait [à l’ombre] sous porche l’escalier du clocher et même là, dissimulé par les gracieuses arcades gothiques qui se pressaient coquettement devant lui comme de grandes sœurs se mettent en souriant pour le cacher aux étrangers devant un jeune frère rustre grognon et mal vêtu ».
Pour la troisième partie, Proust ajoute le sous-titre : « I Le Nom », et il modifié l’incipit par cette addition : « Parmi les chambres dont j’évoquais le plus souvent l’image dans mes nuits d’insomnie aucun ne ressemblait moins aux » chambres de Combray… Le nom de Bricquebec est systématiquement corrigé en « Balbec ». À propos des rêves de Florence, deux additions marginales ont été ensuite biffées : « J’aspirais à en connaître de plus ardents, de plus embaumés, de plus éclatants que ceux dont le désir habitait mon imagination en chassant naturellement tout désir contraire qui aurait pu l’affaiblir, comme était celui des tempêtes et de Balbec »… Peu après, cette addition : « qu’une simple variation atmosphérique suffit à provoquer en moi cette modulation sans qu’il y eût besoin d’attendre le retour d’une saison ». Plus loin, on relève encore cet ajout : « Je n’ai besoin pour les faire renaître que de prononcer ces noms : Balbec, » Plus loin encore, il ajoute que les noms présentent des « personnes – et des villes qu’ils nous habituent à croire individuelles, uniques comme des personnes – une image confuse qui tire d’eux, de leur sonorité éclatante ou sombre, la couleur dont elle est peinte uniformément, comme une de ces affiches, entièrement bleues ou entièrement rouges, dans lesquelles »… Et, vers la fin du placard, 8 lignes sont rayée et remplacées par ce développement marginal : « d’une manière désuète de prononcer qui en avait formé les syllabes hétéroclites et que je ne doutais pas de retrouver jusque chez l’aubergiste qui me donnerait du café au lait à mon arrivée, me menant voir la mer déchaînée et l’église et auquel je prêtais l’aspect disputeur solennel et médiéval d’un personnage de fabliau ».
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