Lot n° 525
Sélection Bibliorare

Rousselet, Jean-Pierre ─ Pierre-Antoine Patel [Collectaire pour l'église Saint-Paul de Paris]. Vers 1698. Somptueux et rare manuscrit à peintures par Patel, soigneusement calligraphié par Rousselet, et relié par Simier pour la Duchesse de Berry.

Estimation : 40 000 – 60 000 EUR
Adjudication : 60 960 EUR
Description

Description

Rousselet, Jean-Pierre ─ Pierre-Antoine Patel

[Collectaire pour l’église Saint-Paul de Paris]. Collectarium ad usum ecclesiae parochialis sancti Pauli in urbe. Ex dono et munificenti DD : Aegidij Le Sourt ejusdem Ecclesiae Pastoris.

Scripsit vero J.P. Rousselet, [Paris, 1698].

Manuscrit à peintures sur peau de vélin. In-folio (337 x 230 mm). Maroquin bleu nuit à long grain, filets dorés et roulettes à froid en encadrement, grande croix au centre des plats composée de roulettes à froid et filets dorés agrémentée de fleurons et de motifs à la cathédrale, la croix repose sur une pièce mosaïquée de maroquin citron elle-même placée sur un piédestal de forme chantournée orné d’un treillage fleurdelisé au centre duquel sont poussées les armoiries de la duchesse de Berry, dos à nerfs orné, roulette intérieure, doublure et gardes de moire rouge, tranches dorées (Relié par Simier, signature en pied du dos). Titre légèrement sali. Texte de la page 39 en très grande partie effacé. Vélin parfois un peu jauni. L’or de quelques lettrines parfois altéré. Petit accident en pied de la page 59 affectant très légèrement deux lettres et le cul-de-lampe de la page suivante. Coins de la reliure légèrement frottés.

Somptueux et rare manuscrit à peintures par Pierre-Antoine Patel, peintre de Louis XIV, soigneusement calligraphié par le maître-écrivain et enlumineur Jean-Pierre Rousselet, et relié par Simier pour la duchesse de Berry.

Collation : 114 feuillets dont 2 blancs. Un titre, pages chiffrées 1 à 92, un feuillet non chiffré (large composition florale à pleine page), un feuillet blanc, pages chiffrées 93 à 219 (p. 183-184 vierges). Première foliotation, non continue, dans les encadrements.

Illustration et ornements :

- Titre calligraphié alternativement en lettres d’or, rouges, bleues et brunes, inscrit dans un riche encadrement doré et rehaussé à la gouache composé d’un treillage et de motifs rocailles. Le tout est surmonté d’un cartouche représentant l’apothéose de saint Paul.

- 14 bandeaux, dont 13 à fond de treillage doré, sur lesquels se détache un cartouche historié de forme chantournée. Y sont peintes des scènes tirées de la vie du Christ, de la Vierge, de saint Pierre et saint Paul et de l’Apocalypse (la Nativité, l’Épiphanie, les saintes femmes au tombeau, l’Ascension, la Pentecôte, la Cène, la conversion de saint Paul, la présentation de Marie au Temple, la crucifixion de saint Pierre, la décapitation de saint Paul, la vision de saint Jean de la Jérusalem céleste, l’Assomption et les quatre anges retenant les quatre vents de la terre).

Ces gouaches, pour certaines signées "Patel" ou "AP", datées "1698" (p. 1, 11, 31, 35, 45, 53, 61, 65, 70 et 75), sont l'œuvre de Pierre-Antoine Patel.

- Culs-de-lampe dorés ou gouachés dont plusieurs compositions florales (une à pleine page après la page 92).

- 151 lettrines, la plupart sur fond or, parfois guilloché, avec rehauts de gouache.

- 56 capitales dorées, 7 fleurons ou culs-de-lampe gouachés et 4 dorés.

- Une grande composition florale à pleine page.

Texte : calligraphié en latin. Lettres romaines et italiques à l’encre brune, rouge, bleue et or par deux mains distinctes. La seconde partie (p. 93-219) n’est pas de Jean-Pierre Rousselet. Texte inscrit dans un cadre doré serti d’un filet noir.

Ce précieux collectaire (recueil des oraisons prononcées par le célébrant pendant la messe), réalisé à l’usage de l’église Saint-Paul à Paris fut commandité par Egide (ou Gilles) Le Sourt, curé de cette paroisse. L’église Saint-Paul fut détruite à la fin du XVIIIe siècle. Au début du siècle suivant, la paroisse est alors transférée à Saint-Louis-des-Jésuites (rue Saint-Antoine), construite entre 1626-1634 par Martellange. L’église prend le double vocable de Saint-Paul-Saint-Louis. Il est toutefois probable qu’à la fin du XVIIe siècle, les deux églises, en raison de leur proximité géographique, aient été liées. Quelques indices permettent d’étayer cette supposition. La présence d’une prière à S. Ignace, fondateur de la Compagnie de Jésus (p. 56-57) et plusieurs prières pour le roi (p. 15 et p. 217-218).

La première partie du manuscrit est l’œuvre de Jean-Pierre Rousselet, émule du célèbre Nicolas Jarry, aussi habile calligraphe que talentueux dessinateur. Originaire de Liège et actif à Paris entre 1677 et 1736, il travailla pour le roi et sa famille ainsi que pour les grands de la cour (les familles Richelieu, Pontchartrin et Beauvilliers).

"Dernier Prince de la Renaissance, Louis XIV avait placé dans les vitrines de son cabinet de Versailles, à côté de ses joyaux et de ses autres trésors, des manuscrits précieux comme les Heures d’Anne de Bretagne […] et continuait à faire peindre et enluminer des animaux, des plantes et des fleurs. Bien plus, Louis XIV fit calligraphier par des spécialistes tels que Jarry et Rousselet et enluminer de grands manuscrits (H.-J. Martin, Histoire de l’édition française, tome II, p. 123).

Portalis attribue à Rousselet Le Labyrinthe de Versailles et l'Office de la Sainte Chapelle réalisé en 1698 pour Louis XIV. Le bibliographe, qui ne mentionne pas ce collectaire, recense 24 manuscrits de Rousselet, dont deux à l’usage de la chapelle Notre-Dame de Versailles provenant de l’ancienne collection du baron Edmond de Rothschild et reliés par Thouvenin : Liber Epistolarum (p. 425) et Liber Evangeliorum (p. 426). Il cite également un livre de prières manuscrit, exécuté pour Marie Leszczynska (p. 428) et ayant appartenu à la duchesse de Berry.

La seconde partie, très probablement légèrement postérieure, est d’une main non identifiée. Le caractère est moins empâté et le bandeau et les lettrines, bien que moins abondamment ornées, sont toutefois d’une exquise élégance. Le fond de la plupart des lettrines de cette partie est resté blanc, aussi est-il probable que le manuscrit n’ait pas été terminé. Les deux parties sont séparées par une composition florale à pleine page.

La calligraphie et la richesse de l’ornementation est remarquablement servie par les gouaches de Pierre-Antoine Patel (1648-1707). Élève de son père, Pierre Patel (lui-même élève de Simon Vouet) fut nommé "maître peintre et peintre ordinaire de la maison du roi". Il réalisa en 1699, soit très peu de temps après la réalisation de ce manuscrit, une commande importante, Les Douze mois de l’année. Les tableaux furent exposés un moment à l’église Saint-Louis. L’ouvrage de Natalie Coural consacré aux Patel, n’indique aucun ouvrage relié peint par Pierre-Antoine Patel. Ce manuscrit est donc un rare et luxueux exemple des talents de miniaturiste de Patel, plus connu comme peintre de paysages.

À la mort de son époux, en 1820, la Duchesse de Berry avait hérité plusieurs manuscrits précieux provenant des collections de Marguerite de Valois, de Henri II, de Louis XIII et de Marie Leszczynska parmi lesquels figurait probablement ce collectaire. Elle aurait alors confié à Thouvenin le soin de l’habiller. Parmi ces collections royales figurait un autre manuscrit de Jean-Pierre Rousselet qui sera vendu en mars 1864. Nous n’avons cependant pas retrouvé ce manuscrit dans les différentes ventes de la Duchesse de Berry. 

Provenance

Marie-Caroline de Bourbon-Sicile, Duchesse de Berry (armes).

Bibliographie

R. Portalis, Nicolas Jarry et la calligraphie au XVIIe siècle, Bulletin du Bibliophile, 1897, p. 423 et ssq. ─ N. Coural, Les Patel : Pierre Patel (1605-1676) et ses fils, Paris, Arthena, 2001. ─ Ch. Galantaris, "La Duchesse de Berry bibliophile" in Revue de la société d'histoire de la Restauration, Paris, 1980, p. 16. ─ A. Bergeron-Foote, notice (coll. privée) à paraître (2009) sur le collectaire à l'usage de Saint-Paul, http://www2.culture.gouv.fr/public/mistral/caran_fr?ACTION=CHERCHER&FIELD_1=REF&VALUE_1=04266

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