Lot n° 5

[BORDE (Charles)]. Parapilla, poëme en cinq chants, traduit de l'italien. À Londres [Paris, Cazin], 1782.

Estimation : 4 000 - 6 000 €
Adjudication : 10 276 €
Description
Petit in-12 de (2) ff. pour le faux-titre et le frontispice, 43 pp., titre compris: maroquin janséniste citron, dos à nerfs, coupes décorées, doublures de maroquin bleu émeraude ornées d'une large dentelle et d'un décor érotique dorés, tranches dorées sur témoins (Trautz-Bauzonnet).

►Édition Cazin recherchée, tirée sur papier vergé. Elle connut plusieurs rééditions et copies.
Parapilla fut publiée pour la première fois en 1776.

►Premier tirage des 6 figures libres hors texte: non signées, elles ont été gravées par Elluin d'après Borel.

Poème facétieux et érotique, Parapilla s'inspire de la Novella dell'angelo Gabriello publiée à Paris en 1757. “Le sujet est licencieux, mais les expressions sont honnêtes; l'ouvrage a été comparé à Vert-Vert, mais il offre plus d'intérêt, l'action marche plus rapidement, et, s'il n'était rare à cause de la nature de son sujet, tout le monde y reconnaîtrait sans difficulté un des meilleurs poèmes badins qu'on ait faits jusqu'ici” (Gay III, 630).
Le poème illustre les vagabondages de “Parapilla”, une tige qui se métamorphosa grâce à l'intervention de l'archange Gabriel en un instrument de jouissance. Ces errances libertines se terminent par l'apothéose de la plante magique: “Le beau Phénix, transporté dans les Cieux, Devint le page & l'amant des Cometes.”
Un ouvrage renié et banni.
Alors que Charles Borde, ami d'enfance de Rousseau, n'a jamais avoué être l'auteur de Parapilla, il en distribua lui-même des exemplaires; cet ouvrage lui est donc généralement attribué, même si d'autres comme Mirabeau l'ont revendiqué.
Parapilla fut retiré par ordre à la vente Auvillain, en 1865, et sa réimpression condamnée sous le Second Empire.

Bel exemplaire en maroquin de Trautz-Bauzonnet avec décor érotique doré à petit fer sur les doublures mêlant phallus ailés, têtes de satires et sexes féminins.

La reliure est du genre de celles exécutées par Bauzonnet pour Frederick Hankey, c'est-à-dire janséniste mais avec des doublures richement ornées de fers spéciaux: “des filles habillées en religieuses”, selon le mot des Goncourt. L'exemplaire pourrait lui avoir appartenu.

À propos de Bauzonnet, les Goncourt rapportèrent les confidences de Hankey: “Bauzonnet ne voulait pas, d'abord. Alors, je lui ai prêté de mes livres. Maintenant il rend sa femme très malheureuse. Il court toutes les petites filles... Mais alors, j'ai eu mes fers. Il me fallait mes fers.” Commentaire des Goncourt: “Corrompre un vieux relieur pour lui arracher des fers obscènes! Au reste, Bauzonnet se fait payer sa corruption. Hankey lui donne ce qu'il lui demande: une petite reliure lui coûte 350 francs” ( Journal I, 1989, p. 799).

Provenance:
•Frederick Hankey?.-
•Gérard Nordmann, avec ex-libris
(catalogue I, n° 65).

(Gay-Lemonnyer, Bibliographie des ouvrages relatifs aux femmes et à l'amour III, 629-631.- Drujon, Catalogue des ouvrages poursuivis, supprimés ou condamnés, 1879, p. 298.- Cohen, 176.- Pia, Les Livres de l'Enfer, 1074-1075.).
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